Chapitre 6 : Capturée


 

 

La Résistance, 

 

La générale Organa serra les poings à la vue de l’armée déployée sur Rago. 

« Très inquiétant, très très inquiétant, commenta C3-PO dans son dos.

— Je ne te le fais pas dire, répondit la générale avant de se tourner vers Ackbar qui coordonnait la mission avec elle. Une idée de comment l’information a pu leur parvenir ? »

L’amiral grimaça.

« Ce n’est pas un des hommes de ma section qui en est responsable. 

— Je doute qu’ils soient ici par hasard, rétorqua Leia.

— Je ne sais quoi vous dire, générale. La seule chose que j’ai découverte c’est que l’un de nos amis de Kalaan était porté disparu. Mais, quand bien même ce serait lui le responsable, il faudrait encore que le Premier Ordre dispose d’un traducteur, or cette langue est tellement peu répandue que je doute que ce soit le cas. »

Leia déglutit et songea à l’éducation parfaite qu’elle avait fait donner à sa fille. Celle d’une princesse d’Alderaan… Et l’étude du kalaanite en faisait partie. 

« Ils en ont peut-être un », murmura-t-elle.

 

Elle n’avait eu aucune nouvelle de Kaydel depuis son départ, conformément à ce qu’elles avaient convenu. En effet, il était prévu que quoi qu’il se passe, Kaydel n’essaierait pas de la contacter avant plusieurs mois, sauf si elle se retrouvait en danger mortel. Aussi, la perspective que le kalaanite soit l’informateur du Premier Ordre et que Kaydel ait pu les aider à comprendre ce qu’il disait, la rassurait. Cela signifiait que tout allait bien pour elle. Même si tout cela était hautement préjudiciable pour les projets de la Résistance, Leia ne put s’empêcher d’éprouver une pointe de soulagement. 

 

Reprenant le contrôle de ses émotions, la générale se tourna vers son compagnon.

« Pour l’instant, ils sont assez éloignés des mines, nous devrions en profiter pour aller récupérer ce que nous pouvons. J’imagine que vous avez un moyen de contourner leurs radars. »

Ackbar en avait un, en effet, et ils se lancèrent à corps perdu dans cette course contre la montre.

 

( ) ( )

 

BB-8 trilla et Rey s’arracha aux bras de Finn, prenant garde à ne pas le réveiller. Elle n’avait pas eu trop envie de parler après l’apparition de Kylo Ren, préférant une autre diversion à ses sombres pensées. 

 

Encore à demi ensommeillée, elle rejoignit Paige pendant que Poe allait se reposer à son tour.

L’œil vif en dépit des longues heures passées debout, la jeune pilote lui jeta un regard en coin.

« Je comprends, tu sais », lâcha-t-elle. 

Rey la regarda, interrogative, et Paige poursuivit :

« Pourquoi tu tiens tellement à aller là-bas. Je n’ai plus que Rose, nos parents sont morts il y a quelques années, assassinés par le Premier Ordre. Je sais ce que c’est de se retrouver orpheline du jour au lendemain. »

Rey lui adressa un regard rempli de compassion. Elle comprenait mieux, désormais, la rudesse dont faisait parfois preuve la jeune femme.

« Pourquoi les ont-ils tués ? Ils faisaient partie de la Résistance ?  lui demanda-t-elle avant de se reprendre. Excuse-moi, c’est indiscret, tu n’es pas obligée de me répondre. »

 

Paige porta machinalement ses doigts fuselés jusqu’au pendentif qui ne la quittait jamais et que Rey avait déjà remarqué. Rose portait l’autre moitié. 

« Le Premier Ordre avait établi un camp de recrutement sur ma planète natale, comme sur d’autres, sans doute. 

— Un camp de recrutement ?

— De rafle serait plus exact, reprit Paige. Ils enlevaient les enfants les plus vigoureux et les déportaient vers leurs centres de conditionnement, afin qu’ils deviennent des stromtroopers. Finn vient certainement d’une planète qui a subi le même sort.

— C’est affreux, murmura Rey.

— Oui, confirma Paige. Mais ce n’était pas la seule chose qu’ils faisaient… Ils procédaient par zones. Une fois qu’ils avaient raflé tous ceux qui présentaient un intérêt à leurs yeux, ils testaient des armes diverses sur la population restante. »

 

Muette d’horreur, Rey ne trouva rien à répondre et, sans la regarder, Paige poursuivit tout en louvoyant à travers un champ d’astéroïdes.

« Nous vivions dans la vingt-cinquième zone de leur découpage. Lorsque les habitants de la numéro vingt-quatre ont été décimés, notre père nous a prises par la main, Rose et moi, et nous a emmenées dans une caverne située à l’écart du village. Avant notre départ, ma mère a pris le médaillon qui était dans sa famille depuis plusieurs générations et nous en a donné une moitié à chacune. Pour qu’on n’oublie jamais qui nous étions et d’où nous venions. C’est la dernière fois que je l’ai vue.

— Pourquoi ne vous a-t-elle pas accompagnées jusqu’à la caverne ? »

Paige se tourna vers Rey et planta son regard dans le sien.

« Parce qu’elle savait qu’elle serait incapable de résister à la torture. Le Premier Ordre avait mis la main sur tous les registres de la planète. Ils savaient que les Tico avaient deux filles et que l’une d’elles correspondait parfaitement à leurs critères de recrutement. »

 

La voix de Paige se fêla sur les derniers mots et Rey tenta une main timide dans sa direction mais la jeune femme releva fièrement le visage.

« Ils auraient pu ne cacher que Rose, mais mes parents ne voulaient pas que nous soyons séparées ou que je sois enrôlée de force dans le Premier Ordre. Alors, ils ont décidé que nous partirions toutes les deux. 

— Pourquoi ne sont-ils pas venus avec vous ? 

— Ils ont pensé que cela serait moins suspect s’ils restaient, plutôt que de faire disparaitre toute la famille. Ils ont prétendu que nous étions mortes d’une maladie quelconque. Depuis l’arrivée du Premier Ordre, les épidémies s’étaient multipliées, cela n’avait donc rien de surprenant. »

 

Rey garda le silence, laissant le temps nécessaire à Paige pour se reprendre.

« Trois jours après que notre père nous ait emmenées, le secteur vingt-cinq a totalement disparu de la surface de la planète. Le Premier Ordre avait choisi de tester une version modifiée du virus de Bledsoe sur les habitants restants. »

Rey déglutit. Elle avait entendu parler de ce virus qui avait fait des ravages dans la Galaxie durant les plus sombres heures de l’Empire. Le contracter signifiait une agonie aussi certaine que douloureuse.

« Paige, je suis…

— Ne dis pas que tu es désolée ! » s’énerva la jeune femme.

Rey baissa les yeux et Paige reprit, plus doucement.

« Depuis ce jour, je me suis promise de protéger Rose, ainsi que mes parents le souhaitaient, et de faire tout mon possible pour que le Premier Ordre soit éradiqué. C’est pour ça que j’ai rejoint la Résistance. Pour que plus aucun enfant ne soit séparé de ses parents comme nous l’avons été, Rose et moi. Pour que les massacres cessent. C’est pour cette cause que je suis prête à mourir. Rien n’est plus important que ça.

— Tu n’es pas d’accord avec ce que nous faisons actuellement, réalisa Rey. Tu comprends pourquoi c’est vital pour moi mais tu es contre ma décision. »

Paige tourna un regard vif sur elle.

« C’est vrai. Je ne suis ici que parce que Poe a insisté pour t’aider et que je sais qu’il serait parti, avec ou sans moi. J’ai préféré venir, histoire d’assurer ses arrières. Si tu veux savoir le fond de ma pensée…

— Vas-y, je t’en prie, maugréa Rey, sur la défensive.

— Je te trouve égoïste de prendre de tels risques alors que tant de personnes comptent sur toi. Tu représentes un espoir pour la plupart des résistants, Rey. A cause de cela, nous t’avons accueillie à bras ouverts et, à la première occasion, tu désertes pour te jeter dans ce qui est probablement un piège. »

 

Les derniers mots de Paige résonnèrent dans l’habitacle et Rey se tourna vers elle.

« Je n’ai jamais demandé à être quoi que ce soit, Paige. Crois-moi, si je pouvais donner cette, cette Force, à quelqu’un d’autre, je le ferais sans hésiter. Depuis que cette chose s’est réveillée en moi, ma vie a été complètement chamboulée… 

— Pilleuse d’épaves, il y a mieux comme existence, persifla Paige. Au moins, maintenant, tu n’as plus à te soucier de ta prochaine ration. »

Rey recula comme si la jeune femme l’avait giflée et la toisa avec froideur.

« Je vivais peut-être pauvrement mais au moins, je n’avais pas à subir cette pression permanente que toi et tous les autres mettez sur mes épaules ! Je souhaite autant que toi voir le Premier Ordre disparaitre et je partage tes convictions mais cela ne t’autorise pas à me juger. J’aiderais la Résistance autant que je le peux mais pas au détriment de ce que j’ai attendu toute ma vie. Tu as dit que tu comprenais, alors mets-toi à ma place : si tes parents, si ta mère, avaient échappé au Premier Ordre ce jour-là et que tu savais que, quelque part, il existe un moyen de les retrouver, que ferais-tu ?

— Moi, je ne suis qu’une pilote parmi tant d’autres, soupira Paige. Toi, tu es tellement plus importante… »

 

Une fois de plus, l’univers changea son axe autour de Rey et le monstre apparut derrière Paige.

« Tu pourras essayer autant que tu veux, elle ne comprendra pas, lâcha-t-il. Aucun d’eux ne le peut, pas même Leia…

— Ta mère ! lui renvoya Rey.

— Mais moi, si, poursuivit-il sans tenir compte de l’interruption. Tu ne le vois donc pas ? Nous sommes liés, Rey. Destinés l’un à l’autre. »

 

Paige continuait de parler et Rey cligna des yeux, posant un regard égaré sur compagne. Derrière la pilote, Ren avait disparu.

« Pas me montrer aussi rude, je suis désolée », déclarait Paige.

Rey lui adressa un sourire incertain tandis que l’autre continuait.

« J’imagine que tu en as bavé, te retrouver toute seule aussi jeune…

— Toi aussi, tu as vécu ça », répondit Rey par automatisme.

Le visage de Paige se fendit d’un sourire, un vrai cette fois.

« Moi, je n’étais pas seule, j’avais Rose et ça change tout. Excuse-moi de m’être emportée, je n’avais pas réalisé à quel point tout cela était difficile pour toi. »

Paige semblait véritablement sincère et Rey lui rendit son sourire.

« Ce n’est rien. Et j’avoue que tu n’as pas complètement tort… Je n’ai pensé qu’à moi en décidant de me rendre sur Kef Bir, avoua-t-elle. Mais, ils me manquent depuis si longtemps. »

La main de Paige se posa sur la sienne.

« Je sais, je comprends. Je vais t’aider, Rey. Pas pour Poe, mais parce que j’en ai envie. »

 

Le cœur de Rey se réchauffa à cette déclaration. Le monstre se trompait, d’autres pouvaient comprendre. Les deux femmes échangèrent un regard complice et Paige sourit.

« Ce qui s’est dit ce soir, ça reste

— Entre nous », compléta Rey.

Elles n’étaient certes pas parties du bon pied, mais, à présent, Rey sentait que Paige pourrait devenir son amie.

 

Le Premier Ordre, 

 

Hux vitupérait à qui mieux mieux tandis que les troopers, empotés, cherchaient la mine d’impervium. Furieux, il se tourna vers son assistant et accessoirement homme de main, le capitaine Opan.

« Pourquoi n’avez-vous pas exigé des informations plus précises ? Cette planète rustique est immense ! 

— Général, je…

— La fille qui a traduit, Cotnix

— Cottbick, le corrigea Opan.

— Je m’en fiche, apportez la moi », le coupa Hux d’un ton froid.  

 

( ) ( )

 

Kaydel revenait à peine dans ses quartiers, au terme d’une longe et ennuyeuse journée passée à compulser des holocartes, lorsque deux troopers la rejoignirent, précédés par leur capitaine.

« Le général Hux exige de vous rencontrer, suivez-moi. »

Nul ne pouvait objecter à la terrible Phasma dont la réputation était déjà parvenue aux oreilles de Kaydel. Se raidissant, la jeune femme emboita le pas à la capitaine, ses doigts effleurant son bracelet avant de retomber, faussement nonchalants.

 

Le voyage sembla interminable à la jeune femme et elle dut plusieurs fois résister à la tentation d’activer sa balise. Phasma se tourna vers elle et son casque s’inclina en direction de son poignet.

« Pourquoi le touchez-vous sans cesse ? »

Kaydel se raidit et se morigéna intérieurement.  Sa nervosité la trahissait, pour réussir, elle devait s’affranchir de Kaydel et devenir pleinement Kaetix. Elle exhiba son bracelet

« Un souvenir de ma défunte mère » lâcha-t-elle, consciente que, plus on s’approchait de la vérité, plus l’histoire était crédible.

 

( ) ( )

 

Kaydel fut conduite jusqu’à une console de commandement et durant le trajet entre la navette et ce dernier, elle jeta un coup d’œil curieux alentour. C’était la première fois, depuis son enrôlement, qu’elle était autorisée à quitter le destroyer et voir enfin de la végétation à nouveau la ravissait. Jusqu’à cet instant, elle n’avait pas réalisé à quel point la vie à l’air libre lui manquait mais, c’était bel et bien le cas. 

 

Phasma, toujours diligente la précéda jusqu’à un homme grand et roux au maintien strict.

« Général Hux, la fille que vous vouliez interroger est arrivée. »

Aux côtés de l’officier, l’une des figures principales du Premier Ordre, rien que ça, Kaydel reconnut le capitaine qui se trouvait dans la salle de torture. Ce dernier lui adressa un bref signe de tête et Hux se retourna. Pendant une seconde, elle croisa les yeux d’un vert limpide du général, puis ce dernier détourna le regard.

« Le capitaine Opan m’a rapporté que c’est vous qui aviez interrogé le prisonnier kalaanite. »

Kaydel confirma d’un signe de tête, le cœur battant. Et si, en dépit de son application à garder son calme, l’IT-0 avait capté quelque chose chez elle ? S’ils savaient qu’elle…

« Les informations sont incomplètes. Que vous a-t-il dit d’autre ? Réfléchissez. »

Kaydel jeta un regard en direction du capitaine qui la fixait d’un œil torve.

« Je, je suis désolée, général, je ne comprends pas le sens de votre question. Le capitaine Opan m’a ordonné de demander au kalaanite où était le gisement et de lui traduire ce qu’il me répondait. C’est ce que j’ai fait. »

Hux adressa un regard noir à son sous-fifre et fit signe à Kaydel d’approcher.

« Savez-vous combien de kilomètres carrés fait cette planète, Cotnix ? »

La jeune femme sursauta en l’entendant, pendant une fraction de seconde, elle crut qu’il l’avait appelée par son vrai nom — enfin celui que Han et Leia lui avaient choisi — avant de comprendre qu’il avait tout bonnement oublié le sien.

« Cottbick, général, » le corrigea Opan.

 

Un nouveau regard noir puis Hux posa de nouveau ses incroyables yeux verts sur Kaydel.

« Pardonnez-moi, je peine à me souvenir du nom de tous nos hommes. Le kalaanite vous a donc dit que le gisement était sur Rago, a-t-il ajouté quelque chose ? Une information plus précise sur sa localisation, par exemple. »

Kaydel réfléchit quelques secondes. Elle avait choisi de livrer cette information au Premier Ordre afin d’abréger les souffrances du prisonnier, restant volontairement vague afin de leur faire perdre du temps, avait-elle fait une erreur ?

Hux était suspendu à ses lèvres et elle plissa le front. 

« Non, je suis désolée, il a juste parlé de Rago.

— Pourquoi ne pas lui avoir demandé d’être plus précis ? »

Le regard vert de Hux était dur, attendant qu’elle s’explique sur ce qui semblait être une faute à ses yeux, et elle jeta un bref coup d’œil à Opan qui la fixait d’un air mauvais. Kaydel comprit que, quoiqu’il se passe, l’autre ne l’aiderait pas. Elle inspira et joua la carte de la naïveté.

« Je, je ne savais pas qu’il fallait que je le fasse. Le capitaine a eu l’air satisfait de la réponse et m’a congédiée… Et, j’avoue que j’étais pressée de partir, » murmura-t-elle en baissant le visage.

Au moins, elle était sincère sur cette partie.

 

Furieux de voir sa propre incompétence révélée, Opan s’avança vers Kaydel comme s’il était prêt à la frapper.

« Insolente, vous… »

La main gantée de Hux lui bloqua le passage et le roux fixa Kaydel pendant quelques secondes avant de se retourner vers son sous-fifre.

« Dit-elle la vérité capitaine Opan ? »

Le visage de ce dernier marqua une hésitation, puis, il reconnut à contrecœur :

« Oui général. J’ai cru qu’elle l’avait correctement interrogé. »

La jeune femme déglutit tandis que les yeux de Hux revenaient sur elle.

« Si j’en crois le dossier que l’on m’a remis avant votre arrivée, cela ne fait pas longtemps que vous appartenez au Premier Ordre. »

S’efforçant de maitriser sa panique grandissante, Kaydel hocha la tête. Contrairement à la mise en accusation qu’elle redoutait, Hux se retourna vers Opan.

« Cette fille ne nous a rejoint que depuis quelques semaines ! Comment vouliez-vous qu’elle sache quoi demander ? Que vous ayez amené une jeune recrue non préparée dans le secteur 666 est déjà une faute grave en elle-même. Mais en plus vous l’avez laissée se débrouiller pour mener l’interrogatoire sans la moindre indication !

— Je pensais que…

— Non, Opan. Vous ne pensiez pas, voilà ce que je vous reproche. Si vous vous étiez donné la peine d’étudier son dossier comme je viens de le faire, vous auriez compris qu’il fallait lui donner des questions précises à poser au prisonnier. »

 

Le ton de Hux était sec et Opan coula un regard chargé de rancœur en direction de Kaydel. La jeune femme se raidit : elle venait involontairement de se faire un ennemi haut placé. Hux se tourna vers elle et la regarda quelques secondes avant de se détourner.

« Vous pouvez retourner reprendre votre poste. »

 

De nouveau, Kaydel réfléchit à la hâte. Elle savait précisément où se trouvait le gisement d’impervium que le général semblait tellement vouloir. Leia et Ackbar avaient prévus d’en extraire prochainement le minerai. Si elle jouait finement, elle tenait une occasion en or de se faire remarquer par le général et de gagner en partie sa confiance pour la suite… En une fraction de seconde, elle prit sa décision, espérant ne pas faire une grossière erreur. Au lieu de partir comme il le lui avait ordonné, elle se racla la gorge.

« Général ? Si je puis me permettre… »

Hux se retourna, visiblement un peu agacé.

« Que voulez-vous ? Une prime ?

— Non, s’empressa de nier Kaydel. Le capitaine m’a déjà rétribuée pour mon aide.

— Alors quoi ? »

 

Kaydel prit une inspiration.

« Si je ne me trompe pas c’est de l’impervium que vous cherchez. Or, si mes souvenirs sont bons, ce minerai a besoin d’énormément d’eau pour se développer dans la roche. Peut-être que vous devriez chercher dans une zone montagneuse entourée de lacs ? Ou d’une rivière importante ? »

Une étincelle s’alluma brièvement dans les yeux de Hux et il se tourna vers l’homme le plus proche.

« Est-ce qu’une zone correspond à cette description ? 

— Deux, mon général.

— Voilà qui réduit considérablement nos secteurs de recherche, se réjouit Hux.

— Si Cottbick a raison, lui rappela Opan. Je doute qu’une petite opératrice aux transmissions sache quoi que… »

La main gantée de Hux se leva, lui imposant le silence et il fixa Kaydel.

« Je vous remercie pour votre aide et pour votre application à servir le Premier Ordre. Si vous avez raison, vous venez de nous faire gagner un temps précieux et je veillerai à ce que vous en soyez récompensée. »

Kaydel déglutit, n’osant demander ce qui se passerait si elle avait tort. Hux se fendit d’un bref sourire.

« Nul ne songerait à vous en tenir rigueur si vos souvenirs étaient inexacts. Rejoignez votre poste. »

 

Comprenant qu’elle était congédiée et sachant qu’elle avait déjà poussé sa chance trop loin, Kaydel le remercia et le salua d’un geste martial. 

 

Elle était presque arrivée à la porte lorsque la voix de Hux la rappela.

« Quel est votre prénom ? »

Lentement, Kaydel se retourna et répondit :

« Kaetix, mon général. »

Leurs yeux se nouèrent de nouveau.

« Kaetix, répéta Hux. Je ne l’oublierai pas. »

 

Une fois dans le couloir la ramenant à la navette, Kaydel s’autorisa un bref soupir de soulagement. Elle s’en était bien sortie et avait atteint son but : le général Hux en personne l’avait remarquée. Restait à voir si cela lui donnerait un avantage ou, au contraire, la desservirait dans sa mission.

 

La Résistance, 

 

Un cri de pure frustration échappa à Ackbar lorsque les éclaireurs lui annoncèrent que le Premier Ordre approchait de leur localisation.

« J’espérais disposer d’un peu plus de temps, soupira Leia. Soit. Les charges explosives sont-elles en place ?

— Oui générale mais nous avons embarqué à peine la moitié de ce nous comptions obtenir.

— Inutile de me le rappeler, pesta Leia. Mais, mieux vaut éviter un conflit frontal qui nous exposerait au risque de perdre le peu que nous avons. Faites évacuer nos hommes, nous allons faire sauter la mine. »

A regrets, Ackbar hocha la tête. Il les savait en infériorité numérique et technologique face au rouleau compresseur du Premier Ordre. Cependant, grâce aux crédits que leur rapporterait la vente de l’impervium au marché noir, ils auraient de quoi financer la suite de leurs opérations.

 

Tandis que leurs vaisseaux s’éloignaient à toute vitesse de Rago et que la mine explosait derrière eux, Leia aperçut l’éclat brillant d’une navette du Premier Ordre qui, visiblement, rejoignait le destroyer. Une puissante sensation lui étreignit la gorge et elle porta la main à son cœur. 

« Tu prends beaucoup trop de risques. Sois plus prudente, mon enfant… » murmura-t-elle.

Ackbar interrompit ce rare moment de communion avec la Force.

« La vice amirale Holdo souhaite vous parler de toute urgence. »

 

( ) ( )

 

Le visage fermé, Leia écouta le rapport de sa subalterne.

« J’ignore complètement où ils ont pu aller, générale et la jeune Rose refuse de parler. J’ai tout essayé mais, elle ne trahira pas sa sœur.

— Inutile de tourmenter Rose, soupira Leia. Ils sont en route pour Kef Bir et, si je ne me trompe pas, ils se précipitent droit dans un piège.

— Ce Dameron est réellement inconscient, ragea Amilyn.

— En l’occurrence, je crois que c’est plutôt notre jeune amie Rey qui est à blâmer, la corrigea Leia. Même si j’espérais que Dameron ait un peu plus de plomb dans la tête. Il faut absolument envoyer une équipe pour les aider, si le Premier Ordre venait à mettre la main sur Rey, ce serait un véritable désastre.

— Je suis déjà à bord du Ninka, à présent que nous savons où ils vont, nous allons tout faire pour les rattraper. »

 

( ) ( ) 

 

 

 Le Faucon Millenium se dirigeait lourdement vers le sol en dépit des efforts conjugués de Poe et de Paige pour empêcher la catastrophe.

« Attachez-vous solidement ! » hurla Dameron tandis que l’appareil se rapprochait dangereusement des hautes herbes. 

Un choc brutal secoua les occupants puis la voix de Paige s’éleva.

« Tout le monde est entier ? »

 

Trois voix et les trilles d’un droïde mécontent lui répondirent et la jeune femme porta la main à son médaillon.

« Tout va bien, » chuchota-t-elle.

Finn se tourna vers Poe.

« Je croyais que tu savais piloter n’importe quoi !

— Oui, quand les commandes répondent, riposta Poe. Or, elles ont cessé de le faire à l’instant où on est entré dans l’orbite de cette foutue lune. »

 

Les ignorant, Rey s’extirpa de la carlingue du Faucon et s’avança, comme aimantée, vers l’océan déchainé qui grondait à quelques mètres de là. Elle aperçut une vaste structure d’acier au beau milieu, telle une île sinistre.

« L’Etoile de la Mort, ou plutôt, ce qu’il en reste, » la renseigna Paige qui s’était glissée à ses côtés.

Un frisson secoua les épaules de Rey mais avant qu’elle ait eu le temps de trouver quelque chose à répondre, Finn poussa un cri.

« On a de la compagnie ! »

 

Le sang battant aux tempes, Rey se retourna mais, au lieu des troupes de Ren qu’elle s’attendait à demi à voir débarquer, elle aperçut une troupe de sauvageons montés sur de curieux animaux.

« Que venez-vous faire ici ?  les apostropha une fille à la peau sombre, semblant être la meneuse. Vous êtes du Premier Ordre ?

— Est-ce qu’on en a l’air ? rétorqua Paige avec agressivité.

— Lui, oui, » répliqua l’inconnue en désignant Finn.

Le jeune homme se raidit instantanément et Poe s’empressa de prendre la parole avant que les choses ne dérapent sérieusement.

« On ne cherche pas les ennuis, on est là parce que notre amie cherche un objet, déclara-t-il en désignant Rey. On le trouve et on s’en va.

— Si le Faucon daigne redécoller, maugréa Paige. Et vu son état, c’est pas gagné… »

 

Les yeux de la jeune autochtone s’agrandirent de surprise.

« Vous avez dit le Faucon ? Le Faucon Millénium ? »

Rey et Poe échangèrent un regard et la jeune femme s’avança, la main sur son sabre laser. Elle ne savait trop si elle serait capable de s’en servir mais, brusquement, en sentir l’acier froid sous sa main la rassurait.

« En quoi ça vous intéresse ? »

L’inconnue baissa les yeux sur la main de Rey et écarta les bras.

« Tout doux la fille… Si on demande, c’est parce que ça fait très longtemps qu’on espère entrer en contact avec la Résistance.

— Vous leur voulez quoi à la Résistance ? interrogea Finn.

— Les rejoindre. Et leur filer des infos sur le Premier Ordre. On les connait plutôt pas mal. »

Une fois de plus Rey et Poe échangèrent un regard tandis que Finn s’avançait, les yeux plissés.

« T’es un stromtrooper ! s’exclama-t-il. Quel matricule ? 

— Plus de matricule, plus jamais, lui répondit fièrement la fille. Maintenant, je suis Jannah. »

 

Un grand sourire se forma sur le visage de Finn.

« Incroyable ! Je croyais être le seul à avoir déserté !

— Tu es FN-2137 ?

— Il s’appelle Finn, maintenant », jeta Rey.

Jannah lui renvoya un regard peu amène.

« Qu’est-ce que tu cherches au juste ?

— Un objet qui me permettrait de retrouver mes parents. »

L’expression de Jannah s’adoucit.

« Orpheline ? Toi aussi, tu as été arrachée à ta famille par le Premier Ordre ?

— C’est tout à fait ça, intervint Poe en jetant un regard d’avertissement à Rey.

— Je crois que ce que je cherche se trouve là-bas », reprit Rey en désignant l’épave battue par des vagues déchainées. 

 

Finn s’étrangla à-demi à la vue du spectacle.

« Sérieux ? Rey… Non. Comment tu veux qu’on aille sur ce truc ?

— Avec un bateau, déclara Jannah comme si c’était la chose la plus naturelle qui soit. Dès que la tempête sera calmée, je vous y emmènerai. En attendant, vous voulez un coup de main pour votre croiseur ? »

Poe accepta avec reconnaissance et le petit groupe commença à s’activer autour du Faucon.

« On devrait avoir de quoi le rafistoler au camp, ce n’est pas loin. Vous venez ? »

Un peu inquiète, Rey retint Poe par le bras.

« Tu crois qu’on peut leur faire confiance ? chuchota-t-elle.

— J’en sais rien, c’est pas moi qui peut lire dans les esprits.

— C’est pas tout à fait comme ça que ça marche, » rétorqua Rey d’un ton maussade.

 

( ) ( )

 

Elle se retrouva au milieu d’une salle décrépie. De l’humidité suintait sur les murs et Kylo Ren la fixait.

« Tu as raison, ce n’est pas ainsi que ça fonctionne… Mais sans personne pour t’enseigner, comment espères-tu y parvenir ?

— J’ai déjà un maitre. Leia Organa. »

 

( ) ( ) 

 

La main de Finn se referma sur celle de Rey et il lui adressa un regard de tendre inquiétude.

« Tu viens ? »

La jeune femme se retourna vers l’épave un bref instant puis hocha la tête.

 

 

Le Premier Ordre,

 

« Ils ont trouvé de l’aide, Maitre Ren. Que voulez-vous que nous fassions ? On attaque le camp où ils se sont réfugiés ?

— Non, pas tout de suite. Attendez qu’elle les quitte pour venir à moi. »

 

La Résistance,

 

Encore ébahi de se retrouver face à des gens qui, comme lui, avaient fui les rangs du Premier Ordre, Finn ne cessait de poser des questions à Jannah tandis que Poe et Paige rafistolaient comme ils pouvaient le Faucon. 

 

Au bout d’un moment, Poe releva le visage et regarda autour d’eux.

« Où est Rey ? »

Immédiatement, Finn se redressa, l’air inquiet.

« Ne me dis pas que… commença-t-il.

— Elle est assez folle pour ça », soupira Poe.

Ils se précipitèrent comme un seul homme vers les falaises qui surplombaient l’océan déchainé et Jannah glapit.

« Où est passé le traineau de patrouille ? 

— On a un autre problème !  hurla Paige en leur désignant la masse sombre qui se dirigeait vers eux.

— Les Chevaliers de Ren ! » s’écrièrent Finn et Jannah au même moment.

 

Poe referma sa main sur son blaster.

« Que tous ceux qui sont armés se préparent à défendre chèrement notre peau.

— Mais… Rey, commença Finn.

— Morts, on ne pourra plus rien faire pour elle, » lui lança Paige, vigoureusement approuvée par Jannah.

Au même moment, la jeune femme repéra de la fumée qui venait de son camp et elle poussa un rugissement de désespoir.

« Au Faucon, on s’y abrite et on se sert des canons lasers pour les descendre, » ordonna Poe.

 

( ) ( ) 

 

Les vagues menaçaient d’engloutir le traineau à chaque seconde. Cramponnée à la barre, Rey ne quittait pas des yeux son objectif, évitant les puissantes lames d’eau. Ses yeux la brulaient mais elle s’obligea à verrouiller son regard aux vestiges de l’Etoile de la Mort. Quelque chose de vital l’y attendait, elle le savait, elle le sentait au plus profond de ses tripes.

 

Finalement, son embarcation de fortune s’écrasa contre la surface d’acier de l’épave et la jeune femme bondit à l’intérieur de cette dernière. Un puissant remugle d’humidité et de métal s’exhalait de l’endroit et elle se troubla légèrement. Elle avait déjà senti cette odeur. Se pouvait-il qu’elle soit venue ici avec ses parents ? Dans ce cas, pourquoi ne s’en souvenait-elle pas ? 

 

Trempée, la jeune femme s’avança et leva les yeux vers le haut de la structure. Elle ressentit alors comme un appel et comprit qu’elle était au bon endroit. Après s’être inutilement essuyé les mains sur son vêtement, la jeune femme entreprit d’escalader la colonne centrale, mettant ainsi à profit les heures passées à s’entrainer sur Ajan Kloss. 

 

( ) ( )

 

« Putain, mais ils sont inarrêtables ! » s’écria Finn.

Paige lui répondit par un regard angoissé tandis que Poe s’évertuait à tenter de faire décoller le Faucon. 

Un tir de blaster déchira l’épaule de Jannah et la jeune femme poussa un cri de souffrance.

« Ils vont nous abattre un par un, comprit Finn. Ils prennent leur temps, ils jouent avec nous… Mais pourquoi ?

— A ton avis ? lui lança Poe. Ils nous occupent afin que nous ne puissions pas partir aider Rey. Tu n’as pas remarqué qu’il manquait quelqu’un dans cette troupe de joyeux drilles ? »

L’angoisse de Finn décupla.

« Ren… La générale avait raison depuis le début. C’était un piège.

— Non, tu crois ? » ironisa Poe avant de tirer en direction des Chevaliers.

 

( ) ( )

 

L’ascension avait été longue et difficile mais elle y était arrivée. Décidée, Rey avança vers l’endroit qui l’attirait irrépressiblement. Derrière la porte, se trouvait l’orienteur, elle le sentait. Le moyen de retrouver ses parents…

 

Une boule d’émotion lui étrangla la gorge tandis qu’elle franchissait le seuil. 

 

La pièce était plongée dans les ténèbres et Rey tira son sabre-laser afin de profiter de sa lumière. 

« Tu en as mis du temps pour arriver jusqu’ici… » déclara une voix rocailleuse qui lui était désormais familière.

 

Le cœur de Rey manqua un battement et elle se retourna en direction de cette dernière. La silhouette sombre et masquée du monstre sortit alors de l’obscurité et Kylo Ren tendit la main dans sa direction.

« Pas cette fois. »

 

La douleur inonda le bras de Rey et elle se retrouva brusquement paralysée, à l’instar de la première fois qu’elle s’était trouvée face à lui.

« Je te l’ai dit, Rey. J’obtiens toujours ce que je veux… »

Un gémissement échappa à la jeune femme et elle sentit qu’il tentait de s’insinuer dans son esprit.

« Cesse de me résister. Tu n’es pas assez forte.

— J’ai déjà réussi une fois », lui renvoya la jeune femme, haletante sous l’effort.

 

La main toujours tendue vers elle, Kylo Ren rétorqua.

« Sais-tu ce qui arrive actuellement à tes amis… A ton précieux FN-2137 ? »

Le sang de Rey se glaça dans ses veines.

« Finn… Non !

— Un mot de moi et mes Chevaliers les tuent tous. Bien sûr, je pourrais choisir de les épargner. Si tu acceptes de me suivre… »

Désemparée, Rey sentit des larmes incontrôlables rouler sur ses joues.

« Tu es un monstre.

— Tout comme toi, rétorqua-t-il. Nous sommes liés l’un à l’autre par la Force. Ta place est à mes côtés. Tu ne le vois donc pas ?

— Je ne deviendrais jamais comme toi.

— C’est ce que nous verrons… A présent, que dois-je faire, Rey ? Acceptes-tu de m’accompagner ou dois-je donner l’ordre à mes Chevaliers d’en finir avec cette vermine que tu appelles tes amis ? »

 

Piégée et toujours paralysée, Rey serra les poings.

« Leur survie dépend de toi…

— Donne l’ordre et je te suis sans discuter, finit-elle par céder.

— Tu ne me fais pas confiance ?

— Difficile d’avoir confiance en une créature masquée qui me harcèle et me fait du chantage », lui renvoya-t-elle.

 

Ren baissa la tête et sa voix profonde retentit dans le comlink.

« Stoppez votre attaque et rejoignez le vaisseau. »

Il s’approcha ensuite de Rey, la main tendue.

« J’ai tenu parole. Tes amis sont en vie. Pour l’instant… A présent c’est à ton tour de remplir ta part de notre accord. »

Le cœur au bord des lèvres, Rey évita la main gantée qu’il lui tendait.

« Je peux marcher seule, 

— Le sabre. Donne-le moi. Comme preuve de ta soumission. »

La jeune femme le fixa avec dégout et laissa tomber l’arme de Luke dans la paume gantée de noir de son ravisseur.

« Ça ne fonctionnera pas, tu sais. Même si j’accepte de te suivre, je ne te rejoindrais jamais du Côté Obscur.

— Crois-tu ? » susurra Ren avant de lui faire signe d’avancer.

 

( ) ( )

 

Alors que la situation semblait perdue, les Chevaliers battirent brusquement en retraite. Surprise, Paige se tourna vers Poe.

« Qu’est-ce qu’ils font ? »

Au-dessus d’eux, le ciel s’obscurcit encore et Poe plissa les yeux.

« Le Ninka ! s’exclama-t-il. C’est Holdo.

— Ca va barder pour nous », marmonna Paige.

A cette minute, la jeune femme n’était pas persuadée que le départ des Chevaliers et l’arrivée des renforts soit la meilleure chose qui puisse leur arriver…

 

Finn, ignorant Jannah qui se tordait de douleur, se précipita vers les falaises.

« Rey ! » cria-t-il inutilement.

Son cœur s’alourdit en reconnaissant l’éclat métallique d’un TIE Silencer quitter l’épave à toute vitesse…

 


Chapitre 5                                                                                                         Chapitre 7


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