Citadelle de l’Ordre de l’Equilibre,
Hapès
C’était la veille du départ de l’expédition de Holdo pour Naboo. Enfermés depuis le début de la soirée dans l’immense appartement du Jedi, Kaydel et Luke savouraient leur dernière nuit ensemble. Les yeux brillants, Luke ne détournait pas son regard de sa compagne, cherchant inconsciemment à graver ses traits dans sa mémoire. Un sourire tendre se forma sur ses lèvres et il caressa légèrement le visage de la jeune femme.
« T’ai-je dit que j’aimais beaucoup ta nouvelle coiffure ?
— Non, mais mieux vaut tard que jamais », murmura Kaydel avant de poser ses lèvres sur celles de son amant.
Le cœur de Luke accéléra. Leur baiser se fit plus passionné et il crispa ses mains sur le dos de Kaydel tandis qu’elle lui ôtait sa tunique. Les doigts de la jeune femme caressèrent son torse et il soupira.
« Tu vas me manquer.
— Vraiment ? plaisanta-t-elle. Vu le contexte où nous nous trouvons, je commence à me demander ce que tu apprécies tant chez moi.
— C’est toi », murmura Luke avant de la débarrasser à son tour de sa chemise.
Le Jedi s’apprêtait à renverser sa jeune padawan sur le lit lorsqu’un murmure lui parvint.
« Luke, Ben a besoin de toi… Il lutte mais sa peine menace de le submerger. Aide-le. »
Douché net, il s’immobilisa au grand dam de Kaydel.
« Qu’est-ce qu’il y a ? »
Les yeux mi-clos, Luke se redressa. La rage et le désespoir de Ben inondaient la Force et la voix de Leia l’exhortait à agir.
« Je suis désolé, » soupira-t-il pour toute explication avant de se ruer à l’extérieur de la chambre.
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Les mains tremblantes et le cœur au bord des lèvres, Kylo Ren laissa échapper un gémissement sourd. La vision de Rey, SA Rey, dans les bras de Hux l’emplissait d’une rage aussi dévastatrice que le chagrin qui inondait Ben. Non, pas que Ben. Il avait beau faire, il ne réussissait pas à se couper de la souffrance que lui provoquait l’étreinte amoureuse de Rey et Hux. L’idée que le roux pose ses mains sur elle, la caresse, la fasse soupirer de plaisir, lui était insupportable. Même s’il n’avait pas eu le temps d’officialiser les choses entre eux, Rey était sa femme et rien ne pouvait changer cela. Le jeune homme inspira profondément pour se calmer mais la jalousie le brûlait avec trop d’intensité pour qu’il y parvienne. Il avait besoin de sortir, de trouver un exutoire à sa colère. Sans réfléchir, il se précipita à l’extérieur de ses appartements d’un pas nerveux, regardant droit devant lui de crainte d’être tenté d’exercer sa vengeance sur le premier individu qui se présenterait. Tout en marchant, il ne cessait de s’exhorter mentalement à se calmer. Il était tellement concentré sur cette idée qu’il ne sentit pas Poe Dameron arriver à l’angle du couloir et il percuta rudement le pilote.
« Tu ne peux pas regarder où tu vas, toi ! » râla Poe sans le reconnaître, lui-même passablement énervé.
Les poings serrés, Kylo Ren lui adressa un regard brûlant de colère.
« Dameron, siffla-t-il, que faites-vous dans cette partie de la Citadelle ? Il me semble pourtant en avoir limité l’accès. »
Poe haussa les épaules.
« Pas aussi bien que vous le croyez, apparemment. »
Son insolence attisa chez son vis-à-vis la rage qui ne demandait qu’à se manifester. Les yeux couleur d’ambre, Kylo Ren tendit la main vers le pilote, un rictus mauvais aux lèvres.
« Dans ce cas, de nouvelles mesures restrictives s’imposent, » déclara-t-il avant de resserrer lentement sa pression sur la gorge de Dameron, se délectant de la souffrance qui apparaissait progressivement sur les traits de plus en plus blêmes de sa victime.
Poe émit un gargouillis inintelligible et Kylo Ren savoura l’instant, imaginant qu’au lieu du brun, c’était Hux qu’il étouffait lentement.
« Ben ! »
La voix cinglante de Luke ramena le jeune homme au présent et lui fit l’effet d’une douche glacée. Eperdu de rage, il se retourna vers le Jedi, relâchant sa victime.
« Cessez de m’appeler ainsi ! C’est le nom d’un mort et je ne suis plus votre padawan ! » hurla-t-il, concentrant sa haine afin de projeter un rideau de feu en direction de Luke.
Ce dernier réagit immédiatement. Au lieu de chercher à éviter l’attaque, il ferma les yeux et les flammes se heurtèrent à un mur de Lumière.
Une fois le danger passé, Luke fixa son fils.
« La Convection, de mieux en mieux… ironisa-t-il. Puis-je connaitre les raisons d’un tel déchainement Obscur ? ajouta-t-il en désignant le couloir dont les murs fumaient, exhalant une odeur de métal fondu. Tu souhaites te lancer dans l’architecture à présent ? Il y a des moyens moins dangereux de modifier un bâtiment, tu sais. »
Haletant, Kylo Ren baissa les mains. Son cœur cognait à tout rompre dans son torse et il détourna les yeux, honteux de ne pas être parvenu à se contrôler. Une fois de plus. Pourtant, après ce qu’il avait fait à Leia, il s’était juré de…
« Ben, que s’est-il passé ? l’interrogea Luke avec plus de douceur. C’est Rey ? Vous avez eu une nouvelle connexion ? »
A ces mots, le chagrin submergea le jeune homme, remplaçant sa rage, et il baissa la tête.
« Je l’ai vue… avec, avec Hux… Ils… Je suis sorti pour essayer de me calmer mais…
— Visiblement, ça n’a pas très bien fonctionné, remarqua Luke. Ce qui vient de se produire illustre pourquoi l’ancien Ordre Jedi proscrivait l’attachement. Ta jalousie t’aveugle et ton obstination à rejeter la Lumière ne fait qu’exacerber tes émotions négatives.
— Je n’ai pas besoin d’une leçon de morale, rétorqua Kylo Ren.
— Non, tu as besoin d’aide, répondit calmement Luke. Tu as beau être puissant, certainement plus que moi, reconnut-il, ton impulsivité et tes… sentiments t’affaiblissent. L’enseignement Jedi comporte de nombreuses techniques visant à contrôler ses émotions et à les utiliser à bon escient. Une chose dont tu pourrais tirer un immense bénéfice.
— Je vous ai déjà dit que je, commença le jeune homme.
— Je sais, le coupa son ainé. Ma proposition n’est pas une énième tentative de ramener vers l’Ordre Jedi, j’ai compris que cela était impossible et je l’accepte. »
Kylo Ren le fixa avec méfiance et Luke poursuivit :
« Kaydel m’a parlé du Temple que tu as fait construire. Et elle m’a très vigoureusement conseillé de m’y rendre. J’avoue que je ne regrette pas de l’avoir écoutée. Je comptais d’ailleurs t’en parler demain. Ce que tu as écris, la manière dont tu conçois la Force… c’est, je ne m’attendais pas à ça », admit-il.
Une lueur d’espoir s’alluma brièvement dans les yeux de Kylo Ren avant d’être chassée par l’incrédulité et son père soupira.
« Ce n’est pas un piège, je te le promets. J’ai lu ton Code et j’ai été surpris de la justesse et de la profondeur de tes phrases. Cependant, quelque chose m’intrigue. Tu dis toi-même qu’il est insensé de se couper de l’un des côtés de la Force, mais tu persistes à rejeter la Lumière. Il serait temps que tu t’appliques tes propres préceptes et que tu explores ta part Lumineuse, tu ne crois pas ? »
Le jeune homme ouvrit la bouche mais, une fois de plus, Luke le devança.
« Je ne te demande pas de me répondre tout de suite, juste d’y réfléchir. Et, si tu décides de prendre ce risque, sache que je suis prêt à t’aider à explorer le Côté Lumineux. Pas comme mon padawan mais d’un Maitre à un autre. »
Une boule remonta dans la gorge de Kylo Ren, conscient du pas immense que son ancien instructeur venait de faire vers lui. Pour la première fois, Luke lui reconnaissait un rang égal au sien et ne le condamnait pas pour ses choix.
« Je vais y penser, merci, souffla Kylo Ren avant de s’aviser de la tenue de son père. Pourquoi êtes-vous torse nu ?
— J’étais un peu occupé quand j’ai senti ta colère dans la Force, marmonna Luke, gêné. Je n’ai pas eu le temps de me rhabiller entièrement. »
Tout aussi embarrassé, Kylo Ren détourna brièvement les yeux.
« Merci d’être intervenu dans ce cas.
— Deux remerciements en l’espace d’une minute, remarqua Luke. C’est plus que durant la décennie qui vient de s’écouler. »
Voyant l’agacement du jeune homme renaitre, il se reprit.
« Je ferais mieux de retourner me coucher avant de gâcher ce moment.
— Oui, c’est préférable », marmonna Kylo Ren.
Le Jedi reprit le chemin de ses appartements mais la voix de Ren le stoppa.
« Comment avez-vous fait pour éviter la Convection ? »
Un léger sourire se forma sur les lèvres de Luke et il s’empressa de le masquer avant de se retourner.
« Grâce à une technique nommée Lumière de Force. Tu sais, le Côté Obscur n’est pas le seul à offrir certaines aptitudes utiles… »
Sans attendre la réponse de son fils, il s’éloigna.
Une fois Luke parti, Kylo Ren se retourna vers Poe, qui, durement éprouvé par le traitement auquel il l’avait soumis, était appuyé contre le mur le plus proche.
« Je suis désolé de vous avoir violenté, lâcha Kylo Ren d’un ton froid. Vous étiez au mauvais endroit, au mauvais moment.
— Manifestement, pesta Poe en se massant la gorge. Pour une fois, je suis d’accord avec le vieux Jedi, vous devriez apprendre à maitriser vos émotions, en particulier la jalousie. »
Un ricanement lui répondit.
« Venant de vous, Dameron, ce conseil est particulièrement déplacé.
— Je ne vois pas ce que vous voulez dire, rétorqua le pilote.
— Bien sûr que si. Ne croyez pas que votre réaction en imaginant l’activité à laquelle se livrait Skywalker avec sa petite apprentie avant de voler à votre rescousse m’ait échappée… »
Le visage de Poe se colora légèrement.
« Vous vous trompez, Ren. Si vous voulez tout savoir, l’Amirale Holdo et moi entretenons une relation, déclara-t-il un peu pompeusement. Et je suis pleinement satisfait de cette dernière. En fait, je suis même amoureux, ajouta-t-il à la hâte.
— Qui essayez-vous de convaincre ? Moi ou vous-même ? persifla Kylo Ren.
— Croyez ce que vous voulez, répliqua le pilote, de plus en plus rouge. Mais, ce n’est pas parce que vous avez la Force que vous êtes infaillible. Sur ce, je pense qu’il est temps que je m’en aille, j’en ai vu assez pour cette nuit. »
Agacé, Ren le regarda s’éloigner.
« Vous ne m’avez pas toujours pas dit ce que vous veniez faire dans cette partie de la Citadelle.
— Je cherchai quelqu’un, marmonna Poe sans se retourner.
— Ah… Pourtant, il me semble que les appartements de l’Amirale se trouvent quelques étages plus bas. Les seules personnes autorisées à pénétrer dans cette zone sont mon état-major, Skywalker et, bien entendu, son apprentie… Je doute que ce soit l’un de mes officiers ou Skywalker que vous vouliez voir, » ironisa Ren dans son dos.
Cette fois, Poe ne répondit pas et le jeune homme posa un regard las sur le mur calciné. Asticoter Dameron l’avait temporairement distrait de son chagrin, mais, à présent qu’il était seul, sa souffrance à la pensée de ce que Rey faisait avec Hux à cet instant se rappelait à lui. Un lourd soupir lui échappa et il se dirigea d’un pas trainant vers son temple, espérant y retrouver un peu de sérénité.
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Amilyn releva le visage lorsque Poe pénétra sans s’annoncer dans ses appartements et fronça les sourcils devant l’expression contrariée de son compagnon.
« Quelque chose ne va pas ? »
Un grognement lui répondit, suivit par un profond soupir.
« Non, c’est simplement que je viens de croiser Ren et … disons que notre rencontre a mal tourné. »
L’Amirale, inquiète, s’approcha de son amant.
« Développe un peu. Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Rien, rétorqua Poe, énervé. Simplement, je suis tombé sur lui au dernier étage de la Citadelle. Il ne s’attendait pas à me trouver là et il a un peu surréagi mais tout va bien, je t’assure.
— Au dernier ? Mais… Seules les personnes autorisées ont accès à cette zone.
— Oui, je sais. Ren s’est montré très clair à ce sujet. Inutile de me faire la leçon toi aussi. »
Amilyn s’efforça de garder son calme devant la mauvaise humeur évidente de Poe.
« Ce n’était pas mon intention, je suis bien placée pour savoir que c’est voué à l’échec avec toi. Je me demandais simplement pourquoi tu t’y trouvais. »
Poe baissa brièvement les yeux.
« Pour rien, je me suis perdu, c’est tout. Cet endroit est tellement grand… Si on parlait d’autre chose ? suggéra-t-il tout en lui prenant la main pour l’attirer contre lui. Je connais de meilleures façons d’occuper notre temps tous les deux que de discuter, surtout de Ren. »
La bouche de Poe s’écrasa sur celle d’Amilyn dans un baiser fougueux et les questions que l’Amirale avait sur les lèvres se fondirent dans leur embrassement. Elle n’était pas dupe : Poe ne lui avait pas tout dit… Il était hautement improbable qu’un pilote aussi émérite, capable de trouver son chemin au milieu d’un champ d’astéroïdes, se perde dans la Citadelle, aussi grande soit-elle. Mais, elle n’était pas certaine que les réponses à ses questions lui plairaient, ni même d’avoir réellement envie de savoir, aussi glissa-t-elle ses longs doigts fuselés dans la chevelure de Poe, une caresse dont elle le savait friand. La réaction du pilote ne se fit pas attendre : un gémissement rauque salua son initiative et il remonta la toge de l’Amirale d’une main assurée, introduisant ses doigts dans l’antre humide de sa partenaire. Cette fois, ce fut au tour d’Holdo de grogner tandis qu’il la doigtait avec vigueur, la sensation de ses mains à la peau durcie par le labeur accentuant le plaisir de l’Amirale.
« Je t’aime, Amilyn, » souffla-t-il entre deux baisers, sans lui laisser le loisir de répondre.
Le cœur de l’Amirale bondit dans sa poitrine en l’entendant et elle l’étreignit de toutes ses forces en réponse, chassant la petite voix en elle qui la poussait à s’interroger sur les raisons d’une déclaration si soudaine…
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Loin d’éprouver la même félicité que son ami Poe, Finn remâchait sa rancœur au fond de la salle de détente allouée au secteur occupé par les Résistants. Il avait tenté plusieurs fois d’approcher Larma D’Acy depuis son coup d’éclat, voyant en elle une alliée potentielle dans sa lutte contre Ren, mais il s’était toujours trouvé un tiers pour lui barrer le passage. A croire que ce bâtard de Ren était omniscient en plus du reste … ou que la Force était avec lui (ce qui était impossible aux vues du personnage).
Lando, flanqué de Chewie dont il semblait devenu inséparable, se laissa tomber sur le siège voisin.
« Encore en train de ruminer ? » se moqua-t-il gentiment.
Peu désireux de donner au vieux briscard l’occasion de débuter un énième sermon sur les nuances et autres fadaises, Finn se contenta d’hausser les épaules. Du coin de l’œil, il vit la Générale Garan pénétrer dans la salle. Malgré lui, le jeune homme la suivit des yeux, appréciant sa démarche assurée et la manière dont ses cheveux sombres luisaient dans l’éclairage artificiel de la pièce.
« Pourquoi tu ne vas pas lui parler, si elle te plait tant que ça ? » glissa Lando, à qui le manège de Finn n’avait pas échappé.
L’ancien trooper, les yeux aimantés par la jeune femme, grimaça.
« Elle est complètement embrigadée par Ren. Elle le considère comme une sorte de sauveur et est incapable de voir la malfaisance de ce type. Il m’est impossible de passer là-dessus. »
Lando roula des yeux.
« Il ne t’arrive jamais de remettre tes certitudes en question ? Certes, Kylo Ren a fait des choses moches, très moches, mais… il a aussi fait du bien. »
Finn ouvrit la bouche pour répliquer mais Lando lui imposa le silence d’un geste.
« Je te l’ai déjà dit : ce n’est pas blanc ou noir, gamin. Leia aussi, en son temps, a commis des actes qui ont semblé impardonnables à ceux qui en ont subi les conséquences. Han a été le premier à en souffrir et pourtant, il ne l’a jamais jugée. Du moins, pas aussi durement que tu le fais pour cette jolie fille dont le seul crime est de faire partie de l’Ordre de l’Equilibre, tout comme toi, au passage.
— Je ne me bas pas pour cet Ordre. Si je suis ici, c’est pour autre chose. Contrairement à Poe ou à toi, je ne pourrais jamais oublier Rose, rétorqua Finn. Ni le fait que Ren est responsable de sa mort.
— Et alors quoi ? Tu vas continuer à te draper dans ta haine et ton ressentiment en prétextant que tu le fais pour honorer la mémoire de Rose ? Tu vas te priver d’une chance de connaitre un peu de bonheur, juste parce que la fille qui te plait croit en une idéologie que tu rejettes sans même savoir en quoi elle consiste ? Ce n’est pas ce que Rose voulait pour toi : elle souhaitait que tu vives autrement que dans son souvenir ou le désir de la venger. Je le sais. J’étais là, moi aussi, lorsqu’elle nous a quitté. Je ne l’ai pas oubliée, contrairement à ce que tu sembles croire, pas plus que les mots qu’elle a eus pour toi. »
Finn se raidit mais Lando n’en tint pas compte.
« Ecoute, tu as laissé passer ton occasion avec Rose parce que tu étais obsédé par la petite Sith. Essaie de ne pas reproduire la même erreur en repoussant ton attirance évidente pour cette ravissante Générale à cause de ton obstination à considérer ceux qui ne partagent pas ton opinion comme des adversaires. Les idéaux sont importants et respectables, jusqu’au moment où ils empêchent de garder l’esprit ouvert.
— Et si elle… commença Finn.
— Si elle quoi ? Si elle te rejette ? Eh bien, au moins, tu seras fixé, s’amusa Lando avant de reprendre son sérieux devant la mine sombre du plus jeune. Finn, je sais que tu as souffert de la mort de Rose, que tu en souffres encore, ajouta-t-il en désignant le pendentif dont le jeune homme ne se séparait jamais. Mais, passer ton temps à chercher comment la venger ne t’aidera pas à apaiser ton chagrin.
— Je ne peux pas le laisser s’en tirer », souffla Finn.
Lando leva les yeux au ciel.
« Cesse de croire que tu es le seul à être malheureux. Crois-moi, Kylo Ren a plus que sa part de tourments. Mais, contrairement à toi, il s’efforce d’améliorer les choses au lieu de se tourner vers la vengeance. Haïr est à la portée de tous, c’est ce qui rend le pardon si précieux. »
L’ancien trooper ne répondit pas et Lando soupira.
« Je vais te dire quelque chose que tu n’as pas envie d’entendre mais quelqu’un doit se décider à le faire. Tu es buté, Finn. Tu as rejeté Rose pendant des mois parce que tu attendais un signe de Rey et, quand tu as enfin compris, c’était trop tard. Ne reproduis pas cette erreur. Cette Lanzora te plait, tout le monde peut le voir, alors arrête de te trouver des raisons de reculer et tente ta chance. Tu sais, il y a un temps pour combattre et un temps pour vivre. »
L’arrivée de Lanzora à leur hauteur empêcha Finn de répondre. Un sourire hésitant se forma sur les lèvres de la jeune femme.
« Je peux me joindre à vous ? »
Lando se leva, l’œil égrillard.
« Je vous cède ma place avec plaisir, j’essaie de dérider ce jeune garçon depuis des heures mais rien n’y fait… Peut-être serez-vous plus chanceuse, » déclara-t-il avant de les laisser seuls.
Lanzora s’assit à côté de Finn et le jeune homme sentit une nuée de parfum lui chatouiller les narines tandis qu’elle secouait ses cheveux pour les libérer de l’élastique qui les retenait.
« Mon service est terminé pour aujourd’hui », lui offrit-elle en guise de justification.
Finn se contenta de la regarder, incapable de prononcer un mot. Elle était réellement somptueuse. Intimidante aussi. Beaucoup plus que Rose ou même Rey.
« Ça te dirait de sortir d’ici pour faire une balade ? proposa Lanzora devant son silence. La nuit est douce et je t’avoue que j’ai envie de respirer un peu d’air frais avant notre embarquement de demain. »
Finn balbutia un accord et ils se levèrent de concert, le jeune homme emboitant le pas à celui de Lanzora, incapable de détacher les yeux du balancement de ses hanches. Elle était une soldate, elle avait été éduquée ainsi, mais même l’entrainement militaire n’avait pu venir à bout de la grâce naturelle de la jeune femme.
Une fois à l’extérieur, Lanzora se tourna vers son compagnon silencieux. Elle ne savait pas ce qui l’avait poussée à rechercher ainsi sa présence, surtout après la mise en garde du Grand Commandeur de l’Equilibre, mais elle n’était pas parvenue à repousser son impulsion. Finn déglutit alors qu’elle le contemplait, attendant visiblement un mot de sa part. La lune projetait de doux reflets bleus dans le ciel sans nuages, illuminant les cheveux sombres de la jeune femme et elle lui adressa un sourire vaguement déçu.
« C’était une mauvaise idée, lâcha-t-elle devant son mutisme. Il est visible que tu n’as aucune envie d’être ici. Je ne sais pas ce qui m’a pris, j’ai cru que je te plaisais. Pourtant, après notre dernière conversation j’aurais dû comprendre que…
— Si, tu me plais, la coupa Finn sans réfléchir. C’est juste que je ne sais pas comment m’y prendre pour… »
La main de Lanzora prit la sienne et le jeune homme s’interrompit, la bouche sèche. A cet instant, il oublia tout : Rose, Rey, la vengeance, la Résistance, la lutte… Il ne restait que le désir, brutal et impérieux qu’il éprouvait pour la femme qui se tenait devant lui. Lanzora, audacieuse, s’approcha de lui et relâcha sa main avant de poser sa paume sur la cuisse du jeune homme.
« Qu’est-ce que tu attends pour te décider ? » le défia-t-elle.
Finn frissonna et se pencha pour prendre ses lèvres. Le baiser fut aussi avide qu’affamé et le sexe du jeune homme se tendit d’un coup alors que la langue de Lanzora explorait sa bouche. Elle remonta sa main le long de sa cuisse, effleurant la verge gonflée de Finn avant de rompre leur baiser. Une lueur dans les yeux, elle le fixa.
« On rentre ? Mes appartements sont au cinquième. »
Comme un somnambule, Finn la suivit et, une fois la porte de sa chambre refermée derrière eux, Lanzora s’approcha de lui pour un nouveau baiser. Le jeune homme ne savait plus où il en était. La respiration hachée par l’excitation, il sentit comme dans un rêve les doigts de sa compagne sur la boucle de sa ceinture puis son pantalon glisser le long de ses jambes. La main de Lanzora se referma sur son sexe tendu et il gémit alors qu’elle le caressait lentement. La sensation était incroyable… Mille fois meilleure que ce qu’il avait expérimenté sur lui-même en de nombreuses occasions.
« Viens, » souffla Lanzora en l’entrainant vers son lit.
Haletant, Finn secoua la tête, incapable de penser à autre chose qu’au désir qui lui tordait les reins.
« Je, j’ai jamais… » balbutia-t-il, honteux.
Une expression de surprise passa un instant sur le visage de sa compagne, bien vite remplacée par un sourire ému.
« Ne t’en fais pas… Je te guiderai. »
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Après sa conversation avec Ben, Luke rejoignit ses appartements, plus confiant qu’il ne l’avait jamais été depuis ses « retrouvailles » avec son ancien padawan. Il posa un regard attendri sur Kaydel, qui enroulée dans les couvertures, dormait profondément et une vague de reconnaissance le submergea. C’était elle qui, en le poussant à visiter le Temple de Ben, lui avait permis de comprendre enfin ce qui animait le jeune homme.
L’apparition soudaine de Maitre Yoda le surprit à peine et Luke laissa échapper un soupir résigné.
« Maitre, cela fait longtemps…
— Trop en colère tu étais pour entendre raison, rétorqua Yoda. Prêt à parler, tu parais maintenant.
— J’imagine que vous êtes venu me faire part de votre mécontentement à mon encontre…
— Discutables sont certains de tes choix, admit Yoda en coulant un regard vers la jeune femme endormie. A les regretter un jour tu seras amené, je le crains. Mais raison, le jeune Ben a. Trop intransigeants et orgueilleux, les Jedis se sont montrés. De bonnes intentions nous avions, mais de la Force nous nous sommes éloignés. »
Médusé par cet aveu, Luke fixa son ancien Maitre.
« Surpris, tu sembles, s’amusa Yoda. Mais, reconnaitre je dois : la bonne voie, ton fils emprunte. Très difficile, cela sera pour lui. Obscur, il est encore trop. La Lumière, il méprise. Lui apprendre à l’accepter, tu devras.
— J’essaierais », affirma Luke.
Yoda frappa le sol de sa canne fantomatique.
« Non ! Fais-le ou ne le fais pas. Il n’y a pas d’essai. Des choix tu seras amené à faire. Pour ton fils et pour la jeune Palpatine. Ne pas reculer, tu devras. Ferme et concentré sur ce que te dis la Force tu dois rester. Confiance en toi et en Ben, nous avons, Luke. »
Rassénéré par cette approbation à laquelle il était loin de s’attendre, le Jedi inclina la tête.
« Je vous jure d’être à la hauteur cette fois, Maitre Yoda. »
Palais Impérial
Coruscant,
Après la scène avec Hux, Rey s’était avérée incapable de dormir, bouleversée par ce qui s’était produit. Elle ne cessait de songer à la lueur de désespoir qu’elle avait brièvement aperçue dans les yeux de l’Usurpateur lorsqu’elle avait répondu aux avances de Hux. Elle aurait dû se réjouir de cette arme inattendue qu’elle se découvrait mais, elle n’y parvenait pas totalement.
La manière dont le Général avait réagi lorsqu’elle l’avait repoussé la troublait également. Il l’avait qualifiée de récipient, de pion dans un Plan Contingence. L’Usurpateur y avait fait référence lui aussi lors d’une de leurs indésirables connexions, elle s’en souvenait… Pourtant, lorsqu’elle avait interrogé Phasma à ce sujet, la Capitaine n’avait pas semblé être au courant.
Rey inspira profondément et ferma les yeux, désireuse d’échapper au tumulte qui bouillonnait sans cesse en elle, tout en sachant que c’était impossible. Chaque jour la douleur dans sa tête se faisait plus intense, plus insupportable. C’était comme si son esprit était coupé en deux, tiraillé entre la voix de son Maitre et les doutes que lui instillait le reflux des vagues…
« Ça ne s’arrêtera donc jamais ? » maugréa la jeune femme.
Un petit cri de surprise lui échappa en voyant se matérialiser une femme d’âge mûr devant elle. Le premier mouvement d’étonnement passé, elle se reprit rapidement et saisit son sabre laser. L’inconnue, dont le visage lui était inexplicablement familier, la contempla durant quelques secondes avant de prendre la parole d’un ton calme, presque maternel, les yeux fixés sur son ventre.
« Mes premiers petits enfants… Jamais je n’aurais cru que ce jour arriverait, déclara-t-elle avec nostalgie. Et pourtant, tu as réussi, tu me l’as ramené. Mon Ben. Hélas, tu as payé le prix fort pour ça…
— Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ? rétorqua Rey.
— Tu sais très bien qui je suis, Rey. Cherche au fond de toi au lieu de laisser Palpatine dicter chacune de tes pensées, » lui répondit la femme avec sécheresse.
La jeune femme serra les poings, les traits tirés, avant de lâcher :
« Leia, la Générale Organa, vous êtes sa mère. »
Cette dernière opina de la tête, un léger sourire aux lèvres.
« La dernière fois que nous nous sommes vues, j’étais encore vivante, quoi que sur le déclin, je me dois de l’admettre. A présent, je n’existe plus que dans la Force.
—Pourquoi êtes-vous ici ?
— Pour t’aider à te souvenir de celle que tu es vraiment, si je le peux.
— Et qui suis-je, selon vous ? ironisa Rey.
— Une femme forte et décidée à défendre mon fils contre tous, y compris contre moi. »
Rey fronça les sourcils tandis que l’océan cherchait à l’attirer.
« C’est ce que tu as fait à notre dernière rencontre. Nous étions sur Ajan Kloss, poursuivit Leia. Il y avait Luke, toi et moi. Tu étais furieuse contre nous. Tu m’as dit mes quatre vérités, tu m’as accusée de ne m’être jamais souciée de mon fils, d’être responsable de la souffrance qui l’a poussé vers l’Obscurité. »
Rey se troubla. Ce que Leia prétendait était impossible, pourtant, ces mots provoquaient un écho étrange en elle, comme si…
« A présent, c’est toi qui lui infliges cette douleur, reprit Leia sans la quitter des yeux.
— Ce n’est qu’un juste retour des choses pour ce qu’il a fait ! répliqua instinctivement Rey alors que les mots de Leia évoquaient dans son esprit le souvenir de Kylo Ren la jetant sur le sol avant d’abuser d’elle.
— Quoi ? Tomber amoureux de toi à un tel point qu’il est prêt à tout pour te protéger ? ironisa Leia avec douceur. Te donner son propre sabre afin que tu remportes une victoire décisive, même si cela va sans conteste à l’encontre de ses propres projets ? Tu n’es pas stupide Rey, tu ne l’as jamais été, interroge-toi sur les raisons qui le poussent à revenir de la sorte vers toi alors qu’il a visiblement obtenu tout ce qu’il désirait, » termina-t-elle en désignant le ventre arrondi de la jeune femme.
La douleur de Rey redoubla.
« Parce qu’il cherche à me manipuler afin que je trahisse mon Maitre, lâcha-t-elle d’une voix altérée.
— La seule chose qu’il tente de faire c’est de t’arracher à l’emprise que Palpatine exerce sur ton esprit, rétorqua Leia. Seulement, tu ne veux rien entendre. Ta souffrance actuelle n’est pas due à mon fils, mais au contrôle de Palpatine. Toi seule peut t’en affranchir, il te suffit de plonger dans l’océan et de trouver le gouffre scellé de ta mémoire, alors, tu comprendras que Ben ne t’a jamais menti. »
Un léger sourire mauvais se forma sur les lèvres de Rey à cette suggestion.
« Vous n’êtes ici que pour me convaincre de vous rejoindre, mais vous perdez votre temps. Jamais je ne tournerai le dos à mon grand-père.
— Ton grand-père ? ironisa Leia sans se démonter. C’est comme ça qu’il s’est présenté à toi ? En utilisant ton besoin d’avoir une famille à son avantage alors qu’il est responsable de l’abandon de tes parents ? »
« Ne l’écoute pas ! » retentit brusquement la voix de Palpatine dans l’esprit de Rey, son ordre répandant une onde de douleur sur son passage.
Un gémissement de pure souffrance échappa à la jeune femme et Leia tressaillit.
« Je sais que tu as mal, Rey, chuchota-t-elle. Tu te sens coupée en deux parce que tu es privée d’une partie de toi-même, de la personne que tu es réellement. Et j’ai conscience de la difficulté de ce que nous attendons de toi… Mais, tu en es capable. Tu es assez puissante pour reprendre le contrôle de ton esprit. Ne laisse pas l’Empereur te détruire, bas-toi pour Ben et pour votre famille.
— Ce bâtard ne représente rien à mes yeux ! hurla Rey, éperdue de douleur. Vos tentatives pour me convaincre sont vouées à l’échec.
— Il existe des preuves. Cherche des informations sur le Plan Contingence, » la pressa Leia.
« Elle cherche à te corrompre, ne la laisse pas faire. Combats-la », ordonna Palpatine d’un ton sans appel.
Rey se raidit et actionna le bouton commandant l’ouverture de son laser. La voyant faire, Leia eut un sourire peiné.
« Pourquoi refuses-tu d’écouter ? Je te pensais plus forte, je te croyais capable de devenir celle que tu voulais être et non la marionnette de l’Empereur.
— Je ne suis pas faible ! ragea Rey. Je suis puissante, je suis l’Impératrice Palpatine et l’avenir des Siths ! Vous et votre rejeton n’êtes rien ! »
Leia se contenta de la regarder sans bouger tandis que Rey déchainait sa colère sur elle, transperçant encore et encore son enveloppe spectrale avant de s’effondrer sur le sol, à bout de forces.
« Rey, résiste-lui, l’implora Leia. Repousse la haine qu’il te dicte. Souviens-toi de Ben, rappelle-toi de que vous avez vécu. »
Rey releva le visage, les iris pareils à deux brasiers et Leia comprit avec tristesse qu’elle avait échoué. Rester ne ferait qu’attiser la haine de la jeune femme et finirait par la mettre en grave danger. L’apparence décharnée de Rey, en dépit de son ventre arrondi, n’avait pas échappé à Leia. Le Côté Obscur rongeait la jeune femme de l’intérieur, corrompant ses chairs comme une gangrène. Rey puisait tant dans l’Obscurité qu’elle risquait d’en mourir, son corps usant toutes ses ressources pour protéger les deux êtres qui grandissaient en elle.
« Je suis tellement désolée, souffla Leia. Pour mon fils, pour toi, mais surtout pour les enfants que tu portes. »
Sur ces paroles, elle disparut, laissant Rey seule avec sa rage.
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Rey inspira profondément. Elle était épuisée et l’apparition de Leia la troublait intensément. Tout comme ce qu’elle avait ressenti face à elle lorsqu’elle l’avait reconnue : du chagrin à la pensée de sa mort, le sentiment d’avoir perdu quelqu’un d’important, avant que tout cela soit balayé par la volonté de son Maitre.
Le doute naissant de Rey grandit en elle, porté par les vagues, et, prenant brusquement une décision, elle se dirigea vers le comlink, aboyant sur le droïde A9G qui répondit.
« Apporte-moi toutes les bases de données que nous possédons sur l’époque du Premier Empire, ordonna-t-elle. Je veux tout, y compris les informations qui ont été classées comme secrètes et dont l’accès est restreint. Surtout celles-ci en fait, réfléchit-elle à voix haute.
— Mais, vous ne faites pas partie des personnes autorisées à… commença le droïde.
—Je suis l’Impératrice, ragea Rey, et ton unique Leader. Ma volonté fait loi. Si tu n’es pas capable de le comprendre, sans doute vaut-il mieux te recycler. »
Un couinement échappa au droïde.
« Je vous apporte cela dans l’heure, Impératrice.
— Parfait. Et ne parle de ça à personne, ajouta-t-elle. Je suis la seule à qui tu dois en référer. »
La réponse empressée du droïde fut interrompue aussi brutalement que la communication.
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