Deux semaines plus tard,

Ajan Kloss,

Holdo referma d’un geste sec le document qu’elle était occupée à compulser et se frotta les yeux avant de s’étirer brièvement. Elle ignorait depuis quand elle n’avait pas dormi plus de trois heures d’affilée mais, avec Leia toujours absente de la base et une situation qui se dégradait dans le Noyau et la Bordure Extérieure, elle ne pouvait pas se permettre de prendre plus de repos.

« Tu es épuisée, » murmura Poe derrière elle avant de poser ses mains sur ses épaules.

Holdo s’abandonna quelques instants aux doigts experts de son amant, savourant le moment de détente impromptu avant de s’écarter alors que des bruits de voix retentissaient dans le couloir voisin.

« Je ne comprends pas ce qui justifie cette absence prolongée de la Générale, râla Poe. Depuis le retour du Faucon, il y a presque deux semaines, nous l’avons à peine vue. Elle passe son temps à l’extérieur dans je ne sais quelle retraite spirituelle avec le Jedi ! 

— C’est bien pour cela qu’elle m’a chargée de m’occuper des affaires courantes. »

Poe ouvrit la bouche pour répliquer mais l’entrée du Major Brance l’en empêcha.

« Il faut qu’on parle, Amirale. Dameron, laissez-nous, je vous prie, » ordonna-t-il d’un ton qui ne souffrait pas la discussion.

Poe adressa un regard meurtrier à l’officier supérieur avant de s’effacer.

Une fois le pilote sorti, Brance ne perdit pas de temps en politesses.

« Savez-vous ce que fabrique la Générale ? Où est-elle ? Quand compte-t-elle revenir ?

— Leia n’a pas quitté Ajan Kloss, objecta Holdo.

— Je sais, cela ! s’agaça Brance. Tout comme je suis au courant qu’elle est avec son frère, occupée à je ne sais quoi ! Ce que je ne comprends pas c’est pourquoi elle déserte de la sorte. Qu’est-elle exactement en train de faire ? »

L’Amirale haussa les épaules avec une feinte désinvolture.

« Je l’ignore, mais Luke a été son Maitre dans la Force par le passé. Peut-être a-t-elle repris son apprentissage de Jedi afin d’augmenter nos ressources face à Ren et Rey ?

— Sans que Kaydel ne soit conviée alors qu’elle est officiellement l’apprentie de Skywalker ? Ce serait étonnant, ironisa Brance. Bref, si vous la voyez avant moi, dites-lui qu’il est plus que temps qu’elle reprenne sa place et assume ses responsabilités. J’ai besoin que quelque chose soit fait, et vite.

— A quel sujet ? »

Le brun leva les yeux au ciel.

« Thadlé Berenko, » répondit-il simplement.

L’Amirale se crispa. La Sénatrice la dégoutait. 

« Que se passe-t-il encore avec elle ?

— Son bras est guéri et elle ne cesse d’hurler depuis le cachot où elle est enfermée. Cela pèse sur le moral des troupes et je commence à craindre que certains ne décident de la faire taire. Non pas que je verserai une larme si cela se produisait, mais ce n’est pas ce que nous avions décidé.

— En d’autres termes, il est temps de la renvoyer d’où elle vient, compléta Holdo. Rassurez-vous. Je vais m’en charger. »

()()

Le visage de Berenko, dépourvu de fards, était blême. Un peu désorientée par le temps qu’elle avait passé en cellule, isolée des membres de la Résistance, la rousse cligna des yeux alors qu’Holdo la conduisait devant un transporteur léger ayant visiblement connu des temps meilleurs. 

Se tenant en retrait, Larma D’Acy suivait les deux femmes, le visage aussi pâle que celui de l’ancienne Sénatrice. Nul ne l’avait obligée à venir faire ses adieux à Berenko mais, en dépit des actes commis par la rousse, Larma l’avait appréciée et une part d’elle compatissait à son sort. Certes, Berenko avait désobéi ce qui avait eu des conséquences tragiques, mais Larma comprenait ses raisons. Elle savait ce que c’était de perdre son rang… tout comme de devoir sans cesse se conformer aux directives de Leia ou d’Amilyn.

« Voici votre navette, déclara sèchement Holdo. Notre contact va vous conduire jusqu’à Burnin Konn où vous serez libre de commencer une nouvelle vie.»

L’ancienne Sénatrice ouvrit la bouche, visiblement stupéfaite.

« Quoi ? Mais… je, je ne veux pas partir ! Et encore moins sur Burnin Konn, cette planète est polluée et frustre, que voulez-vous que j’y fasse ?  Vous n’avez pas le droit de m’envoyer là-bas ! J’exige de voir la Générale Organa immédiatement ! » 

Le visage dur, Holdo secoua négativement la tête.

« La Générale a plus important à faire que de venir vous dire adieu. Nous ne vous laissons pas le choix, ex-Sénatrice. Vos actes d’insubordination et leurs conséquences dramatiques vous rendent indésirable dans nos rangs. Estimez-vous heureuse que nous nous contentions de vous exclure, d’autres que nous auraient exigé votre tête en représailles de la mort de Rose et des blessures que vous avez infligées à Chewbacca. Sur Burnin Konn, vous aurez la possibilité de subvenir à vos besoins en travaillant dans les mines.»

La rousse s’étrangla à demi de rage.

« Je n’ai pas demandé à cette fille de s’interposer ! Si elle est morte, c’est entièrement sa faute. Quant au wookie, il a refusé d’obéir à mes ordres et de me laisser partir. »

Holdo prit une profonde inspiration pour se calmer.

« Chewie n’avait pas à se plier à vos volontés. Il se trouvait sous ma responsabilité. Quant à Rose, je ne peux que regretter que son dernier acte de bravoure ait été pour une ingrate dans votre genre. A présent, partez d’ici. »

Berenko se tourna, éperdue, vers D’Acy.

« Vous ne pouvez pas laisser cette femme m’expédier dans les mines comme une vulgaire esclave, je n’ai pas ma place au milieu de ces gens ! Vous savez ce que j’ai traversé et vous, plus que toute autre, comprenez ce que je ressens. Empêchez cette femme de me dépouiller de  ma dignité, Larma, je vous en prie… »

Holdo se retourna vivement vers la commandante et cette dernière, les joues empourprées, baissa le visage, évitant le regard de la sénatrice.

« Je suis navrée Thadlé, mais c’est la décision de la Générale, nul ne peut la remettre en cause. »

Une déception matinée de dégout se forma sur le visage de la rousse.

« Je vous pensais plus courageuse, Larma, et je compatissais à votre situation. Je réalise à présent que vous occupez exactement la place qui vous correspond : larbin. »

D’Acy tressaillit tandis qu’Holdo fronçait les sourcils, vaguement troublée par cette déclaration. Berenko lâcha un petit rire méprisant avant de se diriger vers l’appareil démodé qui l’attendait.

« Dites à la Générale Organa qu’elle me paiera cet affront, vous me le paierez tous, » ragea Berenko.

Amilyn ne put retenir un soupir de soulagement en voyant le transporteur quitter l’atmosphère d’Ajan Kloss. Derrière elle, D’Acy bredouilla quelques explications mais Amilyn les balaya d’un geste.

« Ne vous sentez pas forcée de vous justifier, Larma. Cette femme est folle, nous nous en sommes tous rendus compte à présent même si, comme vous, nous nous sommes laissé prendre à sa prétendue inquiétude pour son peuple. 

— Mais…objecta Larma, et ses menaces ? Pensez-vous qu’il soit sage de la laisser partir comme nous venons de le faire ? Et si elle révélait notre localisation ?

— A qui ? Au Premier Ordre qu’elle rend responsable de la mort de sa compagne ? ironisa Holdo. Que voulez-vous qu’elle fasse sans argent, sans soutien, et au milieu des mines ? Ne vous inquiétez pas tant, Larma, Leia a pesé toutes les options avant de décider de l’envoyer sur Burnin Konn. Si elle avait pensé que Berenko représentait la moindre menace pour nous, elle aurait procédé différemment. »

La Commandante ne put que reconnaitre le bien fondé des arguments de l’Amirale mais, curieuse, elle l’interrogea :

« Pourquoi Leia n’est-elle pas là ? Personne ne l’a vue depuis des semaines. Amilyn, que se passe-t-il au juste ? »

Holdo répondit, feignant l’assurance :

« Luke et elle sont occupés à définir une stratégie pour la suite des opérations et elle ne souhaite pas être dérangée. Je n’en sais pas plus. »

D’Acy accepta sans sourciller l’excuse et Holdo la regarda s’éloigner, un pincement au cœur devant ce nouveau demi-mensonge, surtout envers Larma qu’elle connaissait depuis aussi longtemps que Leia, avant de secouer la tête. Elle avait raison de ne révéler ses soupçons à personne. Si ce qu’elle entrevoyait s’avérait exact, Leia se retrouverait bien assez tôt dans la tourmente.

()()

« Berenko est partie, » pesta Finn en rejoignant Poe.

Le pilote se troubla devant la hargne à peine dissimulée de son ami. 

« Ta chère Amirale l’a escamotée hier, ironisa Finn. Elle a profité de l’absence de la Générale pour la laisser filer. »

Poe se raidit à cette accusation.

« Je doute que ce se soit passé comme tu le dis. Il a toujours été entendu que Berenko serait chassée de la Résistance une fois son bras guéri et déposée sur une autre planète. Et ça m’étonnerait que la Générale ait choisi une destination de rêve.

— Oui, c’est vrai, reconnut Finn avec une pointe de cynisme. On lui dispense des soins et on la laisse reprendre tranquillement le cours de sa vie, pendant que Rose est sous terre à quelques pas d’ici et n’ira plus jamais nulle part. Belle démonstration de justice. »

Poe déglutit nerveusement. En dépit du temps qui s’était écoulé depuis leur dramatique déplacement sur Naboo, la rancœur de Finn n’avait pas diminuée. Au contraire : plus le temps passait, plus la colère sourde du jeune homme paraissait gagner en intensité.

« Bref, déclara Finn d’un ton amer. Rose est de l’histoire ancienne, n’est-ce pas ? Seul compte le retour du Jedi et les précieuses informations qu’il a glanées… Tellement précieuses que presque personne ne l’a vu depuis qu’il est revenu, tout comme Chewbacca et la Générale. Par contre, du matériel continue à disparaitre régulièrement de l’unité médicale, cependant, ni Chewie, ni Skywalker ne paraissent blessés.

— Tu as entendu Amilyn comme moi, soupira Poe. Elle nous a interdit de chercher à en savoir plus.

— Je ne te pensais pas aussi soumis, rétorqua Finn. Si ça que ça fait d’avoir une relation, très peu pour moi. »

Poe ne répondit pas, les yeux rivés sur Kaydel qui traversait le couloir, l’air abattu. Depuis le retour éclair du Jedi, la jeune femme s’étiolait de jours en jours, et Poe n’avait nul besoin de lui demander si elle avait revu Skywalker pour savoir que ce n’était pas le cas. Ecoutant d’une oreille distraite les récriminations de son ami, le pilote serra les poings. Il avait beau se répéter que la vie personnelle de Kaydel ne le concernait pas, il ne supportait plus de la voir se rendre malade à cause de la négligence du vieux Jedi.

Quelque part dans la Force,

Kylo Ren avait la sensation de flotter, d’être enfin libéré de toutes ses responsabilités, loin de de l’univers qu’il connaissait, de se trouver ailleurs… Ce n’était pas désagréable. En tous cas, moins qu’il ne l’aurait imaginé. Il se sentait léger, détaché du reste du monde et de la souffrance horrible qu’il avait ressentie avant d’atterrir ici. Il frissonna à ce souvenir et regarda autour de lui.

Il aperçut alors un chemin pavé de ce qui semblait être du cristal kyber bleu. Il luisait d’un éclat aveuglant et il en émanait une chaleur quasi maternelle qui l’appelait. Il hésita puis commença à avancer sur ce dernier, attiré par le calme qu’il dégageait. Au bout de la route, il le sentait, il y avait la paix, la fin de la douleur, des conflits. Le terme ultime. Un endroit pour enfin se reposer et cesser de lutter. Il en avait assez de battre contre les Jedis, le Premier Ordre, Palpatine, les Siths… Et par-dessus tout, contre lui-même. 

Il était trop fatigué pour continuer la bataille. La Force l’appelait avec puissance et il se hâta pour la rejoindre.

Ajan Kloss, 

Leia poussa un cri affolé alors que les battements du cœur de Ben s’amenuisaient sur le moniteur et elle le sentit s’éloigner dans la Force.

« Non ! réagit Luke en se précipitant vers la cuve de bacta, impuissant. Bats-toi, Ben ! Ne renonce pas, ne renonce pas », gémit-il.

Sa main chercha celle de Leia et tous deux s’étreignirent avec force. Ils ne pouvaient pas se mentir l’un à l’autre, pas plus qu’ils ne pouvaient nier ce que la Force leur disait. Leur fils était en train de s’éteindre et ils ne pouvaient rien faire pour empêcher ça.

Quelque part dans la Force, 

Kylo Ren entendit soudain une voix… Quelqu’un qui le suppliait de faire demi-tour, de revenir… Pendant un instant, il lui sembla reconnaitre celle de sa mère, enfin de celle de Ben, mais, c’était impossible. Leia avait cessé de faire semblant de se soucier de lui à l’instant où elle l’avait exilé à l’académie Jedi. 

« Je t’en supplie, ne renonce pas… »

La voix était étouffée et il se retourna, troublé. Elle ressemblait à s’y méprendre à celle de Skywalker mais il était tout aussi improbable, voire même plus, que le Jedi s’adresse à lui. Son visage accusa brièvement sa surprise en découvrant la route qu’il venait d’emprunter et qui s’étirait en long ruban. Elle était différente. Elle sinuait également à travers la lumière mais ses pavés n’étaient pas bleus. Derrière lui, le chemin était d’un rouge profond, comme si les cristaux kyber avaient changé de couleur suite à son passage. Intrigué par cette découverte, Kylo s’avança sur la route pavée de rouge avant de s’arrêter, le cœur battant. La chaleur le désertait à chacun de ses pas. Il sentit que, où que cette voie conduise, il n’y trouverait que souffrance et douleur. Sa jambe gauche commença à le brûler et un glapissement lui échappa en la voyant se décomposer. Effrayé, il fit demi-tour, soulagé de la voir se reconstituer à mesure qu’il avançait vers la douce chaleur. Au bout de quelques pas, elle avait repris son apparence normale et Kylo se sentit gagné par la paix. Le chemin bleu était le bon, il ne devait plus se retourner.

Une silhouette imposante, vêtue de noir des pieds à la tête, lui barra soudain le passage. 

« Ainsi, en dépit de toutes tes fanfaronnades, tu n’es qu’un lâche, » déclara Vador d’un ton méprisant. 

Kylo Ren porta la main à sa ceinture, cherchant vainement son sabre laser.

« Laissez-moi passer, nous nous sommes déjà tout dit sur Mustafar. Ce que vous pensez n’a plus d’importance pour moi. »

Vador avança vers lui, le sabre tiré, la lueur rouge de ce dernier se détachant au milieu du bleu de la route, à l’image d’une tâche de sang.

« Tu crois tout savoir, n’est-ce pas ? Tu te penses meilleur, plus fort, plus puissant, plus résistant que je ne l’étais… Une meilleure version de moi, en somme, se moqua Vador. Mais, la vérité c’est que tu es faible, Ben. 

— Je ne suis pas faible ! hurla le jeune homme, hors de lui.

— Ah oui ? Dans ce cas, pourquoi choisis-tu la route la plus simple ? Pourquoi renonces-tu ?

— Parce que j’ai échoué ! ragea Kylo Ren. Je n’ai pas réussi à la protéger ! Je l’ai perdue, j’ai tout perdu ! »

Vador, implacable, continuait à lui barrer la route.

« Tu as été vaincu, c’est vrai. Tu as perdu cette bataille. Mais, est-ce que tu comptes déjà renoncer, juste à cause d’une fille ? Que fais-tu de tes rêves de grandeur ? De tes idéaux ? De ce nouveau monde que tu voulais construire ?

— Sans Rey à mes côtés, tout ça n’a plus la moindre valeur. »

Dark Vador exhala un long chuintement.

« Tu me ressembles décidément beaucoup trop. Et tu t’entêtes à reproduire mes erreurs… En pire. 

— Je n’ai que faire de vos leçons, grinça le jeune homme. Ecartez-vous de mon chemin. »

Sans hésiter, il bouscula son ancêtre et reprit sa route. Au bout de la voie bleue, la paix l’attendait et, avec elle, l’oubli de tout ce qu’il avait perdu, de l’instant où il avait vu Rey abdiquer et s’agenouiller devant l’Empereur.

« Ben ! Elle n’est pas morte, Sidious ne la possède pas entièrement… Tu peux encore la sauver, mais pour cela, il faut que tu fasses preuve de courage et que tu retournes là-bas, cria Vador dans son dos.

— Vous mentez ! cracha Kylo Ren, fou de rage. Tout ce que vous voulez c’est faire de moi votre instrument, mais je ne suis le jouet de personne ! Je fais mes propres choix ! »

Ajan Kloss,

Leia enfouit son visage dans le torse de Luke alors que le rythme cardiaque de Ben s’affolait brusquement. Le Jedi ferma les yeux.

« Il se passe quelque chose, quelqu’un dans la Force… Il essaie de l’aider. Leia, je crois que c’est notre père. Ben ! Ecoute-le, écoute Vador ! Fais ce qu’il te dit ! » hurla Luke.

Quelque part dans la Force, 

Ecoute-le, écoute Vador… Fais ce qu’il te dit.

Les mots se répercutèrent autour de Kylo Ren et il porta les mains à sa tête pour les faire taire.

« Laissez-moi ! Laissez-moi ! supplia le jeune homme des sanglots dans la voix. Je n’en peux plus. Vous aviez raison, je suis faible, incapable… Je l’ai toujours été. Je n’ai aucune place dans le monde, aucune place dans cette histoire. Je ne suis qu’une aberration qui n’aurait jamais dû naitre. Je ne suis pas à la hauteur, je ne l’ai jamais été et je ne le serais jamais ! 

— Rempli d’humilité, pour une fois il est, même si excessif, cela semble, intervint une voix.

Kylo Ren releva le visage et son angoisse redoubla à la vue de la petite créature verte qui se tenait à côté de l’imposante silhouette de Vador.

« Je gère ça, je n’ai pas besoin de votre aide, déclara son aïeul.

— Peu convaincant, tu te montres. Toujours décidé à mourir, il parait. »

Le phrasé étrange de la créature renseigna Kylo sur son identité. Maitre Yoda, celui qui avait tout enseigné à Skywalker et rejeté Anakin…

Ren le fixa sans dissimuler son dégout.

« Que faites-vous ici ? Vous ne représentez rien, vous êtes mort, comme les Jedis. »

La bouche de Maitre Yoda se tordit légèrement sous l’effet de la contrariété. 

« Un grand chaos dans la Force, tu as par tes actes, provoqué. Mais trop tard, il n’est pas… Empêcher le règne de Palpatine tu peux encore, mais de courage et de foi, tu devras faire preuve.

— Je ne tuerais jamais Rey. Si c’est ce que vous espérez me voir faire, épargnez votre salive et poussez-vous », répliqua Kylo Ren.

A nouveau, Yoda laissa échapper une moue irritée.

« Agaçant est ce garçon, tout comme son père et le père de son père. »

Vador se raidit et le jeune homme haussa les épaules.

« Je me moque éperdument de votre opinion. Tout est fini de toute manière. J’ai échoué et j’ai perdu Rey. Je ne retournerai pas là-bas pour accomplir votre stupide mission. Je ne laisserai plus personne décider à ma place. Je préfère encore crever. »

Yoda frappa le sol de sa canne, envoyant des gerbes de cristal autour de lui.

« Assez ! Ecouter tu dois. Modifier les choses, possible est. Sauver la jeune Rey aussi. »

Un éclat de rire incrédule échappa à Kylo Ren.

« Je croyais que vous vouliez tous que je la tue à cause du rôle qu’elle est destinée à jouer ! Il faudrait savoir…

— Un nouvel espoir porte Rey. Plusieurs voies possibles… Changeant est l’avenir, modifié il peut être… si tu agis, » répondit simplement Yoda.

Vador siffla dans son casque avant d’haleter.

« Laissez donc le passer, Maitre Yoda. C’est un lâche. Comme je l’avais pressenti sur Mustafar, il n’est pas prêt, ni suffisamment fort. J’ai honte de le compter dans ma lignée. »

Ces mots se fichèrent droit dans le cœur de Kylo Ren et le jeune homme sentit une nouvelle bouffée de colère l’envahir.

« C’est moi qui devrais avoir honte de faire partie dans votre descendance ! Vous avez blessé votre femme puis vous l’avez laissée pour morte. Si vous l’aviez aimée autant que vous le prétendiez, vous auriez fait l’impossible pour la sauver. Si vous aviez agi ainsi, jamais Luke et Leia n’auraient été séparés à leur naissance. Au lieu de ça, vous avez préféré la laisser agoniser sur le sol pour vous en prendre à Ben Kenobi. Et vous avez perdu. Parce que VOUS étiez faible. Je ne suis pas comme vous, hurla-t-il. Je refuse de l’être ! Je ne trahirais jamais Rey !»

La respiration de Vador marqua un temps d’arrêt et Maitre Yoda ébaucha un début de sourire.

« Alors, qu’est-ce que tu attends pour repartir là-bas ? Qu’il soit trop tard pour sauver ta petite Rey ? Tu as bon gout, s’il n’y avait pas eu ta mère et si j’avais eu quelques années de moins… »

Les yeux écarquillés, Ben fixa l’homme qui venait de parler, oubliant Yoda et Vador.

« Père ? Je veux dire…

— Tu as dit exactement ce que tu voulais dire, fiston. Qu’est-ce que tu crois ? Que parce que mon sang ne coule pas dans tes veines, tu n’es pas mon fils ? Tu crois qu’être père se résume à ça ? Eh bien, tu te trompes ! Je t’ai torché le cul, j’ai vu tes premiers pas et… d’accord, j’ai loupé tes premiers mots, j’avais un marché important avec les Jawas, bref… s’interrompit Han. Qu’est-ce que tu attends pour prouver à ces deux idiots ce que tu vaux ? 

— Je sais ce que je dois faire, mais je ne suis pas sûr d’en avoir le courage, murmura Ren, comme hypnotisé par la vision de Han Solo. Il y a tellement de douleur là-bas… 

— Conneries ! balaya Han Solo d’un geste de la main. La fille, tu la veux ou pas ? 

— Bien sûr que oui ! C’est la seule personne qui compte à mes yeux », lâcha le jeune homme.

Une ombre passa sur le visage de Han Solo mais il se reprit et lui adressa un sourire filou.

« Dans ce cas, cours la reprendre à Palpatine.

— Je ne sais pas si je suis suffisamment fort pour ça, avoua Kylo Ren, des larmes dans les yeux. Vador a dit que je ne l’étais pas…

— Depuis quand tu te soucies de ce que pensent les autres ? l’interrogea Han. Tu n’en as jamais fait qu’à ta tête. »

La vision de Han s’effaça sur ces mots et Kylo Ren tendit la main pour le retenir. 

« Si tu ne retournes pas là-bas, jamais tu ne sauras si Vador avait raison à ton sujet, souffla Yoda. Fais-le ou ne le fais pas, il n’y a pas d’essai. »

Kylo Ren se raidit et se tourna vers la voie pavée de rouge, celle de la douleur, hésitant.

« La fille t’attend au bout, murmura Vador. Du moins si tu es assez courageux pour la rejoindre, mais, après ce que j’ai vu de toi, j’en doute. Tu dis que tu ne veux pas me ressembler mais, toi aussi, tu l’abandonnes à son sort en renonçant à te battre pour elle. Tant pis, Luke sera sans doute forcé de la tuer. »

Le visage de Kylo Ren se figea. La colère grondait en lui, menaçant de tout submerger. La pensée de Skywalker posant ses mains sur Rey, que ce soit pour la tuer ou autre chose, le rendait fou. Tournant le dos à Vador et à Yoda, les dents serrées, il entreprit de remonter la voie qu’il avait précédemment empruntée, la douleur gagnant en intensité à chacun de ses pas. Sa jambe s’affaissait sous lui mais il ne ferait pas demi-tour. Il allait arracher Rey à Palpatine et il tuerait tous ceux qui tenteraient de l’en empêcher. Il y arriverait, même s’il devait ramper pour arriver au bout de cette foutue route !

Une fois qu’il se fut suffisamment éloigné, Vador se tourna vers Yoda.

« A qui parlait-il avant de se décider enfin à bouger ? »

Le Maitre Jedi haussa les épaules.

« Difficile à savoir cela est, beaucoup de choses dans son esprit cet enfant dissimule. Un grand destin pour lui dans la Force, je pressens. 

— Encore un Elu ? ironisa Vador. Sans vouloir critiquer, ça n’a pas vraiment bien marché la dernière fois. »

La contrariété envahit de nouveau les traits de Yoda.

« Seul responsable de cet échec, tu n’es pas. Plus à l’écoute, les Jedis auraient dû être avec toi. Moins attachés à ce qui a toujours été et plus ouverts à la nouveauté. Une grave méprise nous avons commise, ne pas la reproduire il faut. »

Vador le regarda avec stupéfaction.

« Vous admettez vous être trompé ?

— Infaillible nul n’est. »

Vador savoura quelques instants l’aveu de Yoda puis :

« Qu’avez-vous vu à son sujet dans la Force ? Qui est-il ?

— Troublé l’avenir est… soupira Yoda. Trop de choses nous ignorons encore. Mais, pour chaque chose, son contraire dans la Force existe. Pour un Côté Lumineux, un Côté Obscur. Pour un Eternel Sith …

— Un Eternel Jedi, souffla Vador, stupéfait. Pourquoi ne pas le lui avoir dit ?

— Prématurément révélée fut une certaine prophétie. Des grands désordres cela a engendré. Deux fois la même erreur, je ne commettrai pas. Un long chemin cet enfant a encore à faire avant d’accepter qui il peut devenir. »

Ajan Kloss,

La douleur était si insupportable que Kylo Ren se redressa d’un coup, s’assommant contre le verre dur de la cuve dans laquelle il se trouvait. 

Luke et Leia se précipitèrent vers le bac de bacta tandis que Chewie, incapable de rester loin du fils putatif de Han à présent qu’il l’avait retrouvé, se redressait d’un bond.

« Laissez-moi faire, ordonna Luke. Nous ignorons comment il va réagir maintenant qu’il a repris connaissance. »

Leia recula à regret tandis que Luke déverrouillait le couvercle qui se souleva avec un petit bruit de succion.

Kylo Ren, les yeux fous de douleur, ne les regarda même pas.

« Rey. Où est-elle ?  s’écria-t-il tout en se débattant pour sortir de l’endroit exigu où on l’avait enfermé.

— Arrête ! Calme-toi, Ben, » exigea Luke.

Le regard du jeune homme se tourna vers lui et la rage remplaça la douleur dans son regard.

« Vous ! J’aurais dû m’en douter ! » 

Avant que Luke ait eu le temps de prévoir le geste du blessé, la cuve explosa et il s’écrasa contre le mur, à l’instar des autres occupants du bunker, projeté par une vague de Répulsion. Chewbacca émit un grognement de protestation tandis que Leia, au sol, peinait à se relever.

Haletant, Kylo Ren fixa le wookie avec incompréhension.

« Tu n’es pas mort ? »

Chewbacca lui rétorqua que non, mais que ça n’allait pas tarder s’il ne se calmait pas un peu.

Le corps douloureux, Luke se redressa et s’approcha de son fils.

« Bien, je suppose que ça signifie que tu te sens mieux… »

Kylo Ren lui adressa un regard brûlant de haine mais, cette fois, Luke devança son geste et bloqua son assaut.

« Oh non, petit. Pas deux fois. »

Leia, à quelques pas d’eux, dévorait des yeux le visage dur de l’homme qui lui faisait face, cherchant à y retrouver des expressions de l’adolescent qu’elle avait envoyé suivre l’enseignement Jedi.

« Tu as bien changé, Ben, » murmura-t-elle.

La main de Kylo Ren retomba et une expression de dégout passa sur son visage.

« Vous aussi, Sénatrice Organa. Les années ne vous ont pas épargnées, ajouta-t-il cruellement.

— Sans doute. J’imagine que je le dois à l’inquiétude et le chagrin permanents dans lesquels j’ai vécu. »

Les épaules de Kylo Ren s’agitèrent et il émit un rire bref.

« Vous n’avez même pas réussi à tenir cinq minutes avant de me faire des reproches. Un record, même pour vous. »

Sous le ton cinglant, Leia décela la blessure profonde qu’il portait en lui et elle baissa la tête.

« Excuse-moi, Ben. Pour ça, et pour le reste. »

Pendant une fraction de seconde, l’étonnement se lut sur le visage de Kylo Ren puis, il reprit son masque d’indifférence.

« Ben est mort. Je pensais que l’aviez compris, depuis le temps. »

Il ébaucha le geste de se lever et Luke s’interposa.

« Où crois-tu aller comme ça ?

— Ca ne vous regarde pas, cracha Kylo Ren avec hargne. Ôtez-vous de mon chemin.

— Tu n’iras pas loin sur une jambe », ironisa Luke. 

A ces mots, la douleur s’imposa de nouveau dans l’esprit du jeune homme et il baissa les yeux sur son corps nu. Un faible gémissement, rapidement contenu, lui échappa en découvrant sa jambe gauche à demi reliée à son corps et recouverte de bacta. 

« Tu ne la perdras pas, murmura Luke. Du moins, pas si tu nous laisses t’aider. 

— Pourquoi vous feriez ça ? l’interrogea-t-il avec rancœur. Après tout, nous sommes ennemis. Je suis le mal absolu, le Côté Obscur, me voir affaibli devrait vous réjouir. »

Leia étouffa un sanglot, désemparée par l’attitude de son fils. Elle pouvait sentir la hargne s’exhaler par chaque pore de sa peau. La dernière fois qu’elle l’avait vu d’aussi près, il sortait à peine de l’enfance et, en dépit de ce qu’elle savait sur les ravages de l’utilisation des pouvoirs obscurs, rien ne l’avait préparée à se retrouver face à un homme aussi froid et amer.

« Tu crois que je me serais donné la peine de te sauver et de te ramener ici pour te soigner si c’était le cas ? rétorqua Luke.

— Personne ne vous a rien demandé, grogna Kylo Ren. 

— De rien ! s’énerva Luke. Tu, tu n’as vraiment pas changé ! Tu es toujours aussi égoïste, aussi ingrat, aussi…

— La ferme ! Je me fous de ce que vous pensez de moi alors gardez ça pour vos petites conversations entre Jedis, le coupa Kylo Ren. Dites-moi où est Rey. »

Luke et Leia échangèrent un regard. Vu l’état de tension dans lequel Ben se trouvait, sa réaction risquait d’être violente quand il apprendrait ce qui était arrivé.

« J’attends ! » ragea Kylo Ren.

Il ébaucha de nouveau un mouvement pour se lever mais la douleur le plaqua contre la cuve éventrée.

« Déjà, ta jambe, décida Leia. Il va te falloir une nouvelle cuve, attendu que tu as complètement détruit celle-ci. Luke ? »

Le Jedi hésita. Bien que grièvement blessé, Ben était suffisamment puissant pour surpasser Leia dans la Force. Il n’avait aucune envie de prendre le risque qu’il lui fasse du mal ou pire…

« S’il te plait, » murmura Leia avant de reposer les yeux sur le visage fermé de leur fils.

Le Jedi céda, non sans un long regard d’avertissement envers Kylo Ren.

« Si tu veux garder ta jambe et le reste, je te conseille de te tenir tranquille.

— Sinon quoi ? Vous allez tirer votre grand sabre laser de Jedi et essayer de me tuer durant mon sommeil ? » ironisa le jeune homme.

Agacé, Luke fit signe au wookie de garder un œil sur Leia mais sa sœur ne l’entendit pas de cette oreille.

« Chewie, va avec Luke. Il aura besoin d’aide pour rapporter le matériel. »

Luke ouvrit la bouche pour protester mais il croisa le regard suppliant de Leia et renonça. Elle avait tellement attendu ce moment, celui où elle pourrait enfin parler avec leur fils seul à seule… Il n’avait pas le droit de l’en priver, même pour la protéger.

Exegol, 

A l’instant précis où Kylo Ren reprenait conscience sur Ajan Kloss, Rey prit une grande inspiration et se redressa d’un coup, arrachant les tuyaux auxquels elle était reliée. Elle cligna des yeux, incapable de se rappeler où elle se trouvait, ni même ce qui lui était arrivé. Sa tête lui faisait atrocement mal et elle avait l’impression d’avoir été rouée de coups. Elle jeta un regard autour d’elle et fronça les sourcils. Qu’était cet endroit ? Pourquoi y avait-il autant de matériel médical ? Avait-elle été agressée ? Comment s’appelait-elle ? se demanda-t-elle avec angoisse.

« Rey ? Comment vous sentez-vous ? » l’interrogea avec prudence un homme roux.

Les idées de la jeune femme s’éclaircirent un peu. Rey. Oui, elle se souvenait à présent : son prénom était Rey. Elle tourna légèrement la tête vers son visiteur et l’observa de longues minutes. Peu à peu, la mémoire lui revint. Elle connaissait cet homme, c’était le Général Hux, ils œuvraient main dans la main au rétablissement de l’Empire.

« Oui, je crois… Que m’est-il arrivé, Armitage ? »

Le roux marqua un temps de surprise devant la familiarité nouvelle avec laquelle elle s’adressait à lui, puis demanda prudemment :

« Vous ne vous rappelez pas ? »

Rey fronça les sourcils et secoua la tête.

« Non, j’ai l’impression que, que tout est brouillé dans mon esprit. »

Son angoisse était palpable et Hux, un peu mal à l’aise, lui servit le mensonge soigneusement préparé par Palpatine : 

« Nous avons été trahis par Kylo Ren. Des Jedis ont pénétré dans la Citadelle. Ils ont tenté de vous éliminer ainsi que l’Empereur. Vous avez été blessée en essayant de le protéger. »

Le cœur de Rey manqua un battement. Kylo Ren… Ce nom lui rappelait quelque chose mais impossible de se souvenir. Repoussant cela à plus tard, elle se pencha vers Hux.

« Comment va l’Empereur ? l’interrogea-t-elle avec anxiété.

— Il est sauf, grâce à vous, déclara Hux, intérieurement médusé par le changement survenu chez la jeune femme. Vous rappelez vous de qui est-il pour vous ? ne put-il s’empêcher d’ajouter.

— Mon Maitre en toute chose et le seul membre de ma famille qui ne m’ait jamais abandonnée », répondit immédiatement Rey.

Elle avait la tête lourde et le sentiment que quelque chose clochait mais une fois de plus la pensée s’évanouit après qu’elle l’ait seulement formulée.

« Reposez-vous, chuchota Hux, percevant sa fatigue. Nous parlerons de tout cela plus tard. »

Confiante, la jeune femme ferma les yeux et le Général la contempla pendant de longues minutes avant de se décider à sortir de la pièce où elle avait été conduite.

Une fois à l’extérieur, Hux faillit se heurter au Général Pryde et marmonna des excuses. L’homme le fixa avec attention.

« Il semblerait qu’elle soit enfin réveillée. Alors, qu’en pensez-vous ?

— Elle est méconnaissable, transformée, murmura Hux, vaguement nauséeux.

— Evidemment, l’Empereur sait ce qu’il fait ! Allons venez, nous sommes convoqués dans l’amphithéâtre. »

Avec une certaine raideur, Hux lui emboita le pas. Il avait beau faire, il ne parvenait pas à chasser le malaise que sa conversation avec Rey avait fait naître en lui.

Ajan Kloss,

Holdo et Kaydel aperçurent le Jedi et le wookie au même instant. Perturbée par la souffrance et la colère qu’elle percevait dans la Force, la padawan courut à la rencontre de son mentor et amant.

« Qu’est-ce qui se passe, Luke ?

— Où est la Générale ? Et pour qui continuez-vous à piller nos réserves médicales ? Et ne me dites pas que c’est pour Chewie, je sais pertinemment que ce n’est pas le cas. Et de toute manière, il suffit de le regarder pour voir qu’il est en pleine forme », déclara Holdo, sur les nerfs en raison du manque de sommeil, tout en désignant le wookie.

Le Jedi grinça des dents. Il avait espéré que l’excuse d’une prétendue blessure de Chewie suffirait à justifier les larcins commis de nuit mais il avait sous-estimé l’intelligence d’Holdo. Il se tourna vers l’Amirale et :

« Le matériel est destiné à Chewie et tout est normal. Il n’y a aucun étranger sur Ajan Kloss.

— Non mais vous plaisantez ! Vous n’osez quand même pas », commença Holdo.

Une pellicule de sueur se forma sur le front du Jedi et il poussa un peu plus.

« Le matériel est destiné à Chewie et tout est normal. Il n’y a aucun étranger sur Ajan Kloss, déclara-t-il d’un ton ferme.

— Le matériel est destiné à Chewie et tout est normal. Il n’y a aucun étranger sur Ajan Kloss, répéta Holdo.

— A présent, vous allez déclencher un exercice d’évacuation de la base.

— Je vais déclencher un exercice d’évacuation de la base, » annonça l’Amirale avant de s’éloigner.

Kaydel fixa Luke avec stupeur et une pointe de désapprobation.

« Depuis quand tu utilises tes pouvoirs Jedis contre les nôtres ?

— Depuis que cela s’avère nécessaire, rétorqua Luke. J’ai besoin d’une nouvelle cuve à bacta, la précédente a été malencontreusement endommagée et il était plus simple de persuader Holdo d’éloigner les autres plutôt que de ruser avec les droïdes sans oublier tous ceux qui se trouveraient dans les parages. »

Il avait répondu sans s’arrêter, profitant de l’alarme que l’Amirale venait de déclencher pour se diriger vers la zone de soins.

« Luke, je ne comprends pas ce qui se passe ! Et  je ne suis pas la seule. Certains se posent de plus en plus de questions ! »

Le Jedi s’immobilisa.

« Qui ? Et que leur as-tu dit ?

— Poe, Finn, Holdo, Lando, pour commencer ! Et je ne leur ai rien dit puisque je ne sais rien ! Mais, ils ont compris que Chewie et toi aviez ramené quelqu’un. Quelqu’un de gravement blessé mais aussi de très en colère, si j’en crois ce que je ressens dans la Force. Luke, explique-moi ! Qui est-ce ?»

Il inspira longuement.

« Je suis désolé, je n’ai pas le temps. L’alarme ne va pas les maintenir à l’écart plus de dix minutes

— Tu n’en as même pas cinq à m’accorder ? rétorqua Kaydel, anéantie. Ou est-ce une nouvelle excuse pour éviter de me répondre ? Je croyais que nous vivions quelque chose ensemble mais, visiblement, je me suis trompée.

Sa tristesse était si flagrante que Luke se retourna.

« Non. Tu comptes à mes yeux, énormément, surtout ne doute jamais de ça. La vérité, c’est que je, j’ai retrouvé un de mes anciens apprentis. Il est blessé et il a besoin de mon aide. Seulement, il est instable et je ne veux pas t’embarquer là-dedans. Tout comme je préfère que cela reste secret pour l’instant.

— Un ancien padawan ? Je croyais que Kylo Ren les avait tous massacrés !

— Pas celui-ci », murmura Luke en évitant son regard.

Il désigna à Chewie une petite cuve permettant de n’immerger que le bas du corps et de se tenir assis, conscient que Ben ne supporterait pas d’être enfermé entièrement dans un nouveau bain de bacta.

« Fais-moi confiance, Kaydel, s’il te plait, » la supplia-t-il presque.

La jeune femme plongea dans son regard bleuté. Luke avait changé, elle le sentait. Il y avait une nouvelle détermination en lui, comme s’il venait de retrouver un but après ses années d’errances. Elle en était heureuse pour lui, mais elle pressentait également que cela risquait de le détourner de la Lumière. Elle frissonna intérieurement à cette idée saugrenue.

« Je te fais confiance, simplement… Ne me tiens pas à l’écart trop longtemps, d’accord ? »

Il le lui promit, scellant son engagement d’un baiser rapide, accompagné d’une tendre caresse avant de repartir avec Chewie et la cuve de bacta. 

Exegol, 

Lorsque Rey reprit de nouveau connaissance, plusieurs heures s’étaient écoulées. La jeune femme grimaça. Durant son sommeil, elle avait fait d’atroces cauchemars, des visions où Kylo Ren, ce monstre au casque noir zébré de rouge sortait brusquement un sabre laser vert et le brandissait au-dessus de son Maitre, une lueur fanatique dans le regard. Une bouffée de rage monta en elle à la pensée de la trahison de Kylo Ren. L’Empereur l’avait accueilli comme un fils, il lui avait tout donné, tout appris et, en guise de remerciement, Ren avait tenté de le tuer. Pire, il s’était rallié à leurs ennemis de toujours : les Jedis et la Résistance.

Elle grimaça en voyant son corps bardé de tuyaux et jeta un œil sur l’écran des constantes auquel elle était reliée. Son souffle se bloqua en découvrant trois lignes enregistrant les battements cardiaques. La première était sans aucun doute la sienne, mais… à qui appartenaient les deux autres ?

« Seigneur Palpatine, vous voilà réveillée ! »

Rey regarda la femme à l’armure de chrome qui venait de pénétrer dans sa chambre. Qui était-ce ? Elle puisa dans sa mémoire et, à son grand soulagement, un nom lui revint :

« Capitaine Phasma ? Je, je suis désolée, j’ai, mes souvenirs… commença Rey avant de se taire, prise d’une violente nausée.

— Après le choc que vous avez subi, c’est naturel, la rassura Phasma. Ne vous inquiétez pas, le droïde médical nous a affirmé que votre mémoire allait revenir peu à peu. De quoi vous rappelez-vous ?

— Kylo Ren, lâcha Rey avec haine. Il nous a trahis, il a essayé de tuer l’Empereur… Je me suis interposée, je crois, et…

— C’est ainsi que vous avez réussi à sauver notre Leader, compléta Phasma. Sans votre intervention, nul doute qu’il aurait succombé à cette attaque d’une rare lâcheté. »

Rey se rengorgea, flattée. Puis, son regard tomba de nouveau sur le moniteur et elle demanda :

« A qui appartiennent les battements de cœur enregistrés ? »

Phasma se crispa. Elle pensait que la jeune femme serait encore un peu groggy après le lavage d’esprit auquel l’Empereur l’avait soumise, mais visiblement, elle guérissait vite.

« Vous êtes enceinte, lui annonça-t-elle d’une voix rude. Les deux autres battements sont ceux des enfants que vous attendez. »

La rage et la stupeur envahirent à part égales l’esprit de Rey et elle balbutia :

« Enceinte, impossible, je n’ai jamais… »

Alors qu’elle prononçait ces mots, le présent s’effaça et elle bascula dans une vision.

()()

Elle était sur un Destroyer. Elle avait mal, elle avait peur… Du sang obstruait sa vue et il lui fallut quelques secondes pour réaliser que c’était le sien. Elle sentit le trône de Snoke dans son dos et tenta de se relever. Mais c’était impossible. Quelque chose, non quelqu’un, la maintenait sur le sol. Elle leva les yeux et reconnut le visage masqué de Ren. Il contenait ses bras d’une main tout en défaisant son ceinturon de l’autre. Un gémissement échappa à Rey lorsqu’elle entendit le bruit de la boucle métallique tombant sur le sol. Puis, ce furent ses doigts gantés de noir sur son fut alors qu’il le faisait glisser le long de ses jambes. Paniquée, elle ouvrit la bouche pour hurler mais il l’immobilisa à l’aide de la Force et son cri mourut dans sa gorge.

« Ne t’inquiète pas. Ce sera rapide, » gronda-t-il avant de s’abattre sur elle et de se forcer entre ses cuisses. 

La douleur était insoutenable et des larmes de douleur et d’impuissance roulèrent sur les joues de Rey. Indifférent à sa détresse, Ren la besogna pendant plusieurs minutes, déchirant la chair tendre de son intimité à grands coups de boutoir avant de se lâcher en elle avec un râle de satisfaction. Puis, il la libéra et remonta son fut.

« Tu vas oublier ce qui vient d’arriver », souffla-t-il, utilisant la Force pour s’insinuer dans son esprit. 

Elle tenta de résister, révoltée par la manière dont il venait d’abuser d’elle mais il imposa puissamment sa volonté dans ses pensées.

Le Général Hux pénétra dans la salle et son visage se marbra d’inquiétude en la voyant au sol.

« Tout va bien ?

— Oui, Général Hux. Simplement un entrainement un peu trop intense », affirma Kylo Ren.

Le roux fixa Rey.

« Souhaitez-vous que j’envoie des troopers pour vous aider à remettre de l’ordre ici ? »

Sous l’effet de la puissante persuasion de Ren avait utilisée sur elle, Rey déclina.

()()

Revenant au présent, la jeune femme haleta d’horreur et de rage mêlées.

« Ren… C’est lui qui m’a fait ça ! Il m’a violée et puis, il m’a contrainte à oublier ce qu’il avait fait. Le Général Hux a tenté de m’aider mais, il était trop tard… »

Les yeux fous, Rey fixa le moniteur.

« Je veux qu’on ôte ces choses de moi. Tout de suite ! » exigea-t-elle.

Phasma recula. Le visage de la jeune femme était transformé par la haine et la Capitaine se réjouit que sa propre expression soit dissimulée par son casque. 

« Seigneur Palpatine, ce que vous demandez est impos »

La Capitaine porta les mains à sa gorge alors qu’elle se resserrait sous l’effet d’une pression insoutenable. Assise dans son lit, Rey la fixa, le regard mauvais.

« Je vous déconseille fortement de terminer votre phrase. Vous allez faire ce que je vous ordonne sans discuter. »

L’étreinte autour de la gorge de Phasma se desserra et elle recula, à bout de souffle. Rey la toisa d’un air méprisant.

« Vous êtes faible et inutile. Envoyez-moi le Général Hux. Lui saura quoi faire. »

Phasma ne se le fit pas dire deux fois et sortit à la hâte de la pièce. Si les crises de rage de Ren étaient effrayantes, la froideur cruelle de Rey l’était encore plus. 

Pryde s’approcha d’elle.

« Que se passe-t-il ?

— Elle réclame Hux, souffla Phasma. Et elle exige qu’on la débarrasse de SC- 142 bis et ter. »

Le visage de Pryde s’emplit de consternation. 

« Voilà une chose qui n’était pas prévue. 

— Elle est persuadée que Ren l’a violée et que Hux est le seul à avoir tenté de l’aider, ragea Phasma.

— Envoyez lui Hux, si elle le tue dans une crise de colère, ce ne sera pas une grosse perte. De mon côté, j’informe l’Empereur de la situation. »

()()

Rey se redressa à l’entrée de Hux et le salua d’un sourire dépourvu de chaleur.

« Cette incapable de Phasma est donc finalement bonne à quelque chose, puisque vous voilà, commenta-t-elle. Je veux que vous me rameniez immédiatement un droïde médical afin qu’il me débarrasse de ces parasites, » déclara-t-elle en désignant son ventre.

Le Général ne put contenir son trouble devant cette exigence. La jeune femme qu’il avait connue n’aurait jamais voulu une chose pareille. Il s’était souvent moqué du cœur tendre de Rey, la ridiculisant lors de ses communications avec la Base Arrière.

« Seigneur Dejakku, commença-t-il sa langue fourchant sous le coup de l’émotion avant de se reprendre, je veux dire : Seigneur Palpatine, il me semble que cela est un peu prématuré et… »

Le reste de sa phrase fut perdu pour Rey. Un pli perplexe barrant son front, la jeune femme réfléchit : Seigneur Dejakku… Ces mots lui étaient familiers mais … ce n’était pas elle. Non, elle était Rey Palpatine, héritière putative de son Empereur et Maitre. 

L’espace d’un instant, elle entendit un murmure semblable au bruit des vagues lui souffler : Reydejakku, c’est le code d’accès. Un sentiment de plénitude la submergea puis il s’effaça et elle se retrouva face à Hux.

« Seigneur Palpatine ? » lui demandait-il, anxieux.

Elle secoua la tête pour chasser la sensation persistante que quelque chose lui échappait et reprit :

« Je veux qu’on enlève ça de mes entrailles, je sais que vous, vous comprenez ce que je ressens. Après tout, vous aviez pressenti que quelque chose n’allait pas, que Ren m’avait violé, mais ce bâtard s’était déjà insinué dans mon esprit et je n’ai pas pu vous dire ce qui m’était arrivé. Mais, à présent, je me souviens… Vous aviez essayé de m’aider alors… Faites-le maintenant. »

Hux se troubla : à quoi faisait-elle donc allusion ? 

« Quand je pense qu’il vous a dit que c’était un simple entrainement un peu intense, pesta Rey. Pourtant, vous aviez des doutes, je m’en souviens … Vous aviez vu clair dans son jeu depuis le début. »

Le Général manqua de laisser échapper une exclamation stupéfaite en comprenant de quoi elle parlait. Comment était-ce possible de distordre à ce point un souvenir ? Il avait beau être un fidèle de l’Empereur, l’idée lui donnait la chair de poule.

L’entrée de Pryde le dispensa de trouver une réponse.

« Seigneur Palpatine, notre Empereur souhaite que vous veniez le rejoindre dans l’amphithéâtre. Immédiatement. Il m’a chargé de vous accompagner. »

Rey se leva et arracha les appareils médicaux.

« Ne vous donnez pas cette peine. Le Général Hux s’en chargera. »

Le visage de Pryde se contracta et il adressa un regard rempli de haine au roux.

« Très bien, comme vous voudrez », s’inclina-t-il toutefois, l’exemple de Phasma lui ayant permis de se représenter ce que pouvait faire le réceptacle lorsqu’il était contrarié.

()()

Une sensation de malaise envahir Rey alors qu’elle pénétrait dans l’amphithéâtre et la jeune femme mit ça sur le compte de sa grossesse et des souvenirs de la trahison de Ren. 

Elle s’approcha du Trône des Siths et s’agenouilla devant son Maitre attendant, tête basse, de recevoir ses ordres.

« Ma jeune apprentie et digne héritière, commença Palpatine, arrachant un frisson de plaisir à la jeune femme à se voir ainsi gratifiée. Je suis heureux de te voir sur pied et remplie de haine à l’égard de Kylo Ren. Tu m’as bien servie et tu as démontré récemment que j’avais eu raison de t’accorder ma confiance. Cependant, en ma qualité de Maitre et dans le but de servir l’Eternel Sith, il me faut exiger de toi un nouvel effort. Je veux que tu mènes cette grossesse indésirable à terme. »

Le visage de Rey se remplit de confusion et elle serra les poings. Pendant une fraction de seconde, l’envie de se rebeller et de tuer l’Empereur se fit sentir en elle mais elle disparut aussi vite qu’elle était venue.

« Maitre, je ne comprends pas, osa-t-elle objecter. Pourquoi ? »

Palpatine se pencha vers elle, son corps pourtant neuf exhalant déjà des relents de putréfaction.

« Les choses que tu portes sont dotées du plus important taux de midi-chloriens jamais observé de mémoire de Siths. Eduqués dans le respect et la soumission au Côté Obscur, ils seront l’arme qui nous permettra de l’emporter définitivement et de régner à jamais sur le reste de la Galaxie. Une fois qu’ils seront nés, tu me les remettras afin que je les élève dans la tradition de notre culte. Quant à toi, en guise de récompense, tu vas prendre la tête de notre Empire restauré et deviendras l’Impératrice Rey Palpatine. »

Le cœur de Rey bondit de satisfaction en l’entendant. La promesse de détenir autant de pouvoir valait bien quelques mois de sacrifice.

« Je ferais ainsi que vous me le demanderez, Maitre, » accepta-t-elle.

Palpatine émit un ricanement satisfait. Elle était parfaite… SC-142 était sans le moindre doute sa plus magnifique création. Pour l’instant… Il lui tardait de former SC-142 bis et ter.

« Te sens tu prête à prendre dès maintenant tes fonctions et à commander le Dernier Empire ? Je compte sur toi pour traquer la Résistance et ce faible de Ren.

— Oui Maitre. J’ai hâte de trouver ce bâtard. Je l’affronterais de nouveau et cette fois, je le tuerai !

— Il sera inutile de t’exposer de la sorte, mon arme secrètement élaborée sur Castilon sera bientôt terminée. Grâce à elle, nous pourrons réduire en cendres la Résistance, le Jedi Skywalker et Kylo Ren. Occupe-toi simplement de les trouver et de poursuivre notre œuvre de conquête de la Galaxie. Le Général Pryde te secondera dans cette tâche. »

Rey se troubla légèrement.

« Pryde ? Pourquoi pas Hux ? Il m’est fidèle et dévoué », affirma-t-elle sans tenir compte du fait que le roux assistait à leur entrevue.

Palpatine se contracta légèrement devant cette marque d’insoumission imprévue avant de se détendre. Hux connaissait bien le réceptacle, mieux que Pryde, il était donc parfaitement indiqué pour garder un œil sur elle et s’assurer qu’aucune résurgence mnésique ne viendrait troubler ses projets. Certes, la Restructuration Mentale qu’il avait infligée à SC-142 paraissait avoir fonctionné mais il gardait à l’esprit l’image incongrue de l’océan qui s’était interposée sur sa route lorsqu’il s’était insinué en elle. 

« Soit, mon apprentie. En tant que nouvelle Impératrice de notre Galaxie et digne représentante de l’Eternel Sith, je t’autorise à choisir celui qui te secondera. »

Rey s’inclina aussi bas qu’elle le pouvait.

« Merci, Maitre….

— Ne me déçois pas, Rey Palpatine, souffla l’Empereur. Il me serait pénible d’avoir à te punir. »

()()

Fou de rage, Pryde rejoignit Phasma et la capitaine se troubla en le découvrant dans cet état.

« L’Empereur a changé d’avis, pesta-t-il. Le réceptacle a requis que Hux conserve sa place à ses côtés et il a accepté ! »

La Capitaine des Stormtroopers se força à garder son calme tandis que son mentor rageait dans ses dents.

« J’ignore comment ce foutu parricide a fait, mais il a réussi son coup. L’Empereur ne se rend pas compte de sa médiocrité : il n’est pas à la hauteur de ce que la tâche exige.

— Notre Chef Suprême finira par s’en apercevoir, déclara Phasma. Vous pouvez compter sur moi pour rapporter au Conseil Obscur chaque signe, même infime, de faiblesse de Hux. »

Le vieux Général lui adressa un regard reconnaissant. Il savait pouvoir compter sur Phasma. Elle était certes une nouvelle convertie aux valeurs de l’Empire, dans le sens où elle n’était encore qu’une enfant durant cette glorieuse époque, mais il l’avait lui-même recrutée et formée et il la savait plus déterminée qu’aucun d’entre eux à voir l’hégémonie de Palpatine s’installer de nouveau sur la Galaxie. Elle ne laisserait aucune occasion à Hux de mettre en péril leur rêve.

« Si cela s’avérait nécessaire, commença Pryde.

— Je l’éliminerai sans la moindre hésitation », affirma Phasma.

Chapitre 41                                                                                                     Chapitre 43