Chapitre 4 : Le poids des mots


Une fois Lord Beckett parti, James se laissa retomber sur le lit. Pour la première fois depuis longtemps, le Commodore se sentait dépassé par les événements. Il avait cru Elizabeth perdue pour lui à jamais et jusqu’à quelques jours c’était bien le cas. Seulement Beckett avait fait irruption dans leurs vies, le mariage avait été interrompu, le marié était parti, le Gouverneur mort et Elizabeth…

 

Le visage de James se contracta à la pensée de la jeune femme et ses pensées le ramenèrent malgré lui vers les paroles prononcées par Beckett. Le Lord doutait des sentiments d’Elizabeth et ses propos le ramenaient à un temps que James aurait préféré oublier à jamais. Le cœur lourd, le Commodore revit le baiser brûlant dont Elizabeth avait gratifié William Turner, la manière dont elle lui avait tourné le dos et…

« Non ! »  S’exclama-t-il pour lui-même.

 

Non, décidément non, Elizabeth ne pouvait pas être ainsi. Un sourire vague se forma sur ses lèvres alors qu’il se rappelait des regrets d’Elizabeth, de ses lèvres douces sur les siennes, de la chaleur de son corps qui…

« Monsieur ?? » L’interrompit son majordome.

James sursauta, mécontent de se voir ainsi interrompu.

«  Quoi ? Demanda-t-il d’un ton rogue qui ne lui était pas coutumier.

- Avez-vous encore besoin de quelque chose Monsieur ? »

 

Un sourire amer éclaira les lèvres de James. Oh ça oui il avait besoin de quelque chose, seulement malheureusement pour lui Beckett avait tout gâché une fois encore.

«  Servez moi un brandy, » ordonna t’il.

Les yeux du majordome s’agrandirent de surprise mais James l’ignora.

«  Et laissez donc le carafon à côté de mon fauteuil, puis allez-vous coucher. Je n’ai plus besoin de vous ce soir.

- Soit Monsieur, bonne nuit Monsieur. »

 

James marmonna une réponse puis se dirigea vers le salon. Son esprit était toujours embrumé par le doute que Beckett y avait instillé. Est-ce qu’Elizabeth se rapprochait de lui par réel désir de sa compagnie ou pour échapper à Beckett ? Les échos des paroles qu’elle avait prononcées lui revinrent en mémoire à nouveau et James but songeusement son verre. Elizabeth avait dit qu’elle regrettait, qu’elle s’était trompée… mais ne l’avait-elle pas déjà trompé une fois pour s’assurer la libération de Will. Voulait-elle réellement l’épouser ou son désir n’était-il qu’un leurre destiné à contrer Beckett ?

 

Agacé par les questions sans réponse que Beckett lui avait soufflées, James finit son verre d’un trait et se resservit largement.

 

Il en était à son troisième verre et se sentait de plus en plus morose lorsque le domestique toussota.

« Commodore, je, vous avez un visiteur…

- Dites-lui de repartir, ordonna Norrington.

- C’est que Monsieur, il insiste, il prétend que vous deviez le rencontrer au sommet du Fort. »

 

James mit quelques secondes à réaliser.

« Sacrebleu ! Groves. Bien sûr, faites le entrer. »

Le fidèle officier pénétra avec hésitation dans la pièce, tandis que Norrington se tournait vers lui, furieux après lui-même d’avoir oublié leur rendez-vous.

«  Qu’avez-vous appris ? » Lui demanda-t-il d’un ton sec.

Une moue navrée se forma sur les lèvres de Groves.

«  Pour l’instant pas grand-chose j’en ai peur. Les domestiques sont plutôt méfiants et très inquiets sur leur devenir à présent que le départ de Mademoiselle Swann est décidé. »

James se crispa légèrement à cette mention. Pendant une fraction de seconde, il songea à demander à Groves ce qu’on disait sur Elizabeth puis se ravisa.

« En d’autres termes vous n’avez rien appris. Déclara-t-il avec dépit.

- Pas encore Monsieur mais j’ai réussi à nouer connaissance avec une fille de cuisine, Gracie, elle semble, disons plus ouverte. »

 

James haussa le sourcil devant la rougeur discrète des pommettes de Groves.

« Et bien allez-y, n’hésitez pas, nous devons découvrir la vérité Groves, peu importe les moyens employés. »

Groves hocha la tête et prit congé peu après. Une fois seul, James songea que Groves était sans doute plus heureux que lui… Au moins, il n’avait pas à se demander pourquoi Gracie s’intéressait à lui…

 

()()

 

« De quel droit me suivez-vous ? s’écria Elizabeth une fois que Beckett fut monté dans la voiture.

- De ce même droit qui fait de vous ma pupille, répondit froidement le lord.

- Je ne suis pas un animal que l’on tient en laisse !

- Permettez-moi d’en douter. Vos manières tendent à prouver le contraire. »

A ses côtés, Mercer esquissa un sourire cruel tandis qu’une rougeur s’accentuait sur les joues d’Elizabeth.

«  Cela ne vous concerne en rien !

- Dois-je vous rappeler que je viens d’assister à une scène tout à fait parlante ? Vous vous trouviez sous le Commodore et… »

Un frisson de honte et de rage parcourut l’échine d’Elizabeth.

«  Taisez-vous, » souffla-t-elle en tournant la tête vers la fenêtre du véhicule.

 

Un rire sec agita l’aristocrate accompagné de celui, silencieux, de son homme de main.

« Heureux que vous partagiez mon avis, poursuivit-il. Un peu de patience ma chère, vous n’aurez dans quelques temps plus à rougir de ces situations. »

Malgré sa gêne, la jeune femme le fixa sans comprendre ses paroles.

« Sachez que Norrington m’a demandé votre main. Passé un délai de six mois où nous aurons l’un comme l’autre la certitude de vos sentiments à son égard, vous pourrez donner libre court à vos pulsions. »

Les trois occupants du carrosse furent quelque peu secoués quand l’attelage s’engouffra dans une ruelle plus étroite.

« Mais… » commença-t-elle avant de s’interrompre, soudainement à court de mots.

 

Quelques minutes auparavant, elle se trouvait dans les bras de James, prête à lui donner ce qu’elle réservait depuis toujours à Will. C’était lui qu’elle aurait dû épouser et pourtant…

« Que se passe-t-il ? Railla Beckett. Le marié ne vous convient guère ? Je crains que le mariage soit un passage obligatoire pour jouir de votre nuit de noce.

- Je vous défends de m’insulter, rétorqua-t-elle. Il… il me faut du temps pour réfléchir… »

Le lord plissa sciemment son regard gris.

«  Votre intérêt semble moins vif soudainement. Auriez-vous donc commis l’irréparable ?

- Non ! S’écria-t-elle, mortifiée d’avoir une telle conversation avec ces deux vils inconnus.

- Il m’est difficile de vous croire. Nous ferons appel à un médecin afin qu’il vous examine. Monsieur Mercer, ajouta-t-il à l’adresse de ce dernier. Veillez à trouver un homme de confiance afin qu’il se rende au plus vite auprès de Mademoiselle Swann. »

Une vague de pure haine submergea Elizabeth qui tendit son poing pour l’écraser sur le visage de Cutler Beckett. L’homme de main, aussi prompt qu’un serpent, attrapa son poignet qu’il tordit sans compassion.

Elle cria de douleur tandis qu’il resserrait son emprise en la ramenant vers lui.

« J’éviterais cela si j’étais vous, souffla-t-il.

- Ne me touchez pas ! Gémit-elle en essayant de se dégager.

- Vous feriez mieux d’écouter Monsieur Mercer, déclara Beckett en approchant ses lèvres de son oreille. Ne commettez pas l’erreur de recommencer. »

Elle sentit le souffle de l’aristocrate dans son cou alors qu’il ajoutait :

« Vous pourriez le regretter… »

Sur un hochement de tête du lord, Mercer la repoussa brutalement. Tremblante, la jeune femme se renfonça pour s’éloigner le plus possible des deux hommes qui lui faisaient face.

Ravalant un sanglot, elle ferma ses poings et enfonça ses ongles dans la paume de sa main pour endiguer ce flot de faiblesse.

Elle ne leur accorderait pas le plaisir de ses larmes !

 

()()

 

Le Moissonneur filait sur l’onde noire au gré d’un vent clément. A quelques miles, les contours d’une île se dessinaient dans les ténèbres, imposant subtilement sa masse sombre à l’horizon. A bord du navire, Will s’activait consciencieusement à la tâche qu’on lui avait attribuée. Tandis qu’il manœuvrait la drisse, son esprit s’égara une fois de plus vers Elizabeth.

 

Comment allait-elle ? Beckett lui avait-il fait du mal ? Se trouvait-elle encore à Port Royal ?

Tant de questions tournaient dans sa tête qu’il n’entendit pas le maître d’équipage l’appeler plusieurs fois.

 

« Je t’cause gamin ! » S’énerva le marin en lui donnant une violente claque dans le dos.

 

Will serra les dents en se tournant vers l’homme bourru dont le visage portait les stigmates d’une maladie vénérienne.

« Le Capitaine t’attend en bas, poursuivit-t-il d’un ton moqueur.

- Pourquoi ? demanda Will, intrigué.

- Fais ce qu’on t’dit, bâtard ! On discute pas les autres du Capitaine ! »

Non loin, trois matelots se mirent à ricaner en regardant le jeune homme se diriger vers l’entrepont.

«  On n’en meurt pas, p’tit ! » déclara le vieil homme qui l’avait recruté avant de s’esclaffer.

 

Il entendit l’écoutille se refermer derrière lui alors qu’il descendait dans le ventre du navire. Il plissa le nez sous l’infâme odeur de chair de poisson putréfiée et d’urine qui emplissait l’atmosphère.

« Il y a quelqu’un ? » Appela-t-il en sondant l’obscurité.

Il vit osciller dans les ténèbres un halo orangé, quelque part au fond de la cale.

« Viens par là ! » S’éleva soudainement une voix rauque.

 

Contournant plusieurs amas de cordages, de tonneaux et de caisses, Will avisa enfin le Capitaine du Moissonneur. Aussi sale que ses matelots, une bedaine démesurée étirait la toile de sa chemise crasseuse. Sa face suintante était à moitié dévorée par une barbe noire, s’alliant à sa chevelure hirsute et malodorante.

« T’en as mis du temps ! » déclara ce dernier en attachant sa lanterne à un crochet contre le mur.

Le jeune retint de grimacer sous l’haleine chargé de l’homme alors qu’il s’approchait de lui.

« Que dois-je faire ? » demanda Will.

Les petits yeux noirs du Capitaine se mirent à briller d’une lueur étrange.

« Seulement payer l’prix de ta présence à bord !

- Je croyais que nous nous étions entendus, répondit le forgeron.

- Avec mes gars pt’être mais pas avec moi ! » Gronda-t-il en abattant un poing dans son ventre puis sur son visage.

Sonné, le Capitaine en profita pour projeter le jeune homme contre le mur.

« Ton cul fera l’affaire ! »

 

Sur ces mots, il défit les attaches de son fut pour exhiber un sexe violacé avant de se coller à Will. Pressé, il découvrit la croupe de sa proie tout en pressant son bras sur sa nuque pour l’immobiliser.

« Aussi douce qu’une femelle, » hoqueta-t-il en se frottant à lui.

Will sursauta en sentant cette chose rigide contre lui et tenta de se libérer.

« Lâchez-moi ! cria-t-il.

- Ferme-la ! Rugit l’autre. Ce sera un peu moins douloureux si tu restes tranquille. »

 

Des larmes commencèrent à perler au coin de ses paupières alors qu’il essayait toujours de se dégager. Tandis qu’il sentait la verge du Capitaine s’approprier son corps, il réussit à se saisir de la lanterne qu’il envoya à la tête de son agresseur.

Celui-ci hurla quand l’huile enflammée lécha son visage.

 

Tremblant, Will ramena son fut sur ses hanches en reculant le plus possible de cette torche humaine. L’autre continuait de battre l’air en poussant des cris terribles, embrasant le bois du plancher et la marchandise sur son passage.

Au-delà de ce funeste chant, le forgeron entendit de l’agitation sur le pont puis l’écoutille qu’on ouvrait précipitamment.

Sans plus réfléchir, il se précipita vers la trappe servant à décharger toutes les immondices du bateau et plongea dans les flots noirs.

 

()()

 

Patiemment, Groves attendit que Beckett et son chien de garde soient remontés dans le carrosse après avoir raccompagné Elizabeth Swann. Une fois certain que le véhicule se fut suffisamment éloigné, il se dirigea vers la porte de l’office et tapa quelques coups au battant.

Comme il s’y attendait, Gracie l’attendait de pied ferme après lui avoir promis qu’il repasserait la voir après son ouvrage militaire.

« Vous êtes venu, murmura-t-elle.

- Je tiens toujours mes promesses, » répondit-il avant d’esquisser un sourire à la jeune fille.

Il lui tendit une rose qu’il avait pris soin de cueillir quelques instants plus tôt.

 

Fort de son expérience, il savait que certaines femmes, surtout les plus démunies, se révélaient plus loquace après un cadeau…

 

Rougissant plus encore, elle accepta la fleur et fit entrer le lieutenant avant de le conduire jusqu’aux cuisines.

« Les autres dorment, chuchota-t-elle. Je n’ai que peu de temps à vous accorder, si Monsieur Hartley nous voit il me renverra sur le champ.

- Monsieur Hartley ? demanda Théodore sur le même ton.

- Le majordome.

- Alors je vais me hâter d’inscrire votre beauté dans ma mémoire pour m’en repaître jusqu’à notre prochain rendez-vous, » répondit-il suavement.

 

Elle ne correspondait pas tout à fait à ses critères féminins, trop blonde et trop pale, mais la fille n’était pas désagréable.

 

Gracie baissa timidement les yeux alors qu’il s’emparait de sa main.

Autour d’eux, les cuisines de la maison Swann sommeillait paisiblement. Les braises de la cheminée crépitaient à peine, renvoyant une faible lueur ambrée dans l’âtre noirci.

 

« Je ne pensais pas rencontrer une jeune femme comme vous, poursuivit-il. Surtout en de telles circonstances…

- Oui, affirma-t-elle en frissonnant sous les doigts du militaire courant sur son bras. Pauvre gouverneur et pauvre Miss Swann.

- C’est une bien triste affaire, continua Groves en se penchant sur son cou. Il devait se sentir bien seul pour commettre un tel acte, il est dommage que personne n’ait pu lui venir en aide. »

 

Tout en parlant, il frôlait de ses lèvres le cou de la domestique dont la respiration avait accéléré.

 

« C’est Mary, la fille de la cuisinière, qui a retrouvé le gouverneur. Elle venait vider son pot quand elle a retrouvé le pauvre homme. On l’a entendu crier dans toute la maison. Qui aurait pu croire qu’il mettrait fin à ses jours ? Ils ont dit qu’il était certainement mort au beau milieu la nuit et pourtant… »

Elle s’arrêta de parler quand il effleura de ses lèvres la naissance de sa poitrine.

«  Et ? demanda-t-il, aux aguets.

- La pièce où nous dormons se trouve sous la chambre du gouverneur. L’aube était presque là quand je me suis réveillée pour aller boire un peu d’eau et je pourrais jurer avoir entendu le gouverneur marcher dans sa chambre. »

 

Le jeune lieutenant écarquilla son regard sombre alors qu’une de ses mains effleurait la cuisse de la fille.

 

Réfléchissant à toute allure, il se souvint du rapport qu’il avait lui-même établi en découvrant le corps au matin, aux alentours de huit heures.

 

En l’absence du Commodore, il avait été dépêché pour confirmer le décès et n’avait pu que constater le suicide. Le médecin présent l’avait d’ailleurs confirmé et avait daté la mort aux environs de minuit. Cette théorie démentait de toute évidence un décès aux aurores...

La fulgurance d’un détail lui revint brutalement en mémoire. Lorsqu’il avait touché le gouverneur pour prendre son pouls avant l’arrivée du médecin, Théodore avait éprouvé la souplesse et la tiédeur de sa peau.

 

Un corps ne devenait roide qu’après six heures environ et s’il était mort en plein milieu de la nuit, soit huit heures auparavant, pourquoi le corps était-il encore chaud ? Et pourquoi le médecin aurait-il menti ?

 

« Cela est bien étrange, chuchota-t-il en continuant de la caresser.

- Même Marshall n’a pas vu le gouverneur cette nuit-là, souffla-t-elle en s’accrochant aux épaules de Groves.

- Qui est Marshall ? demanda-t-il ingénument en frôlant de sa langue la jugulaire de Gracie.

- Le garçon d’écurie. Chaque soir ce brave… gouverneur le saluait de sa fenêtre alors que le petit rentrait dormir, gémit-elle. C’est ce qu’il nous a dit quand on a appris sa mort… »

 

Une nouvelle interrogation vint s’ajouter dans l’esprit du militaire qui avait de plus en plus de mal à donner le change.

 

Il devait au plus vite rejoindre le Commodore pour lui remettre ces informations !

 

La saisissant par la taille, il embrassa la domestique qui se pendit à son cou, prête à lui rendre inconsciemment les efforts qu’il avait fournis.

 

Galvanisé par les renseignements qu’il avait recueilli autant que par ce corps offert, il la poussa sur la table, releva ses jupons et la pénétra d’un puissant coup de rein.

 

()()

 

Sous le regard inquiet d’Estrella, Elizabeth se laissa retomber sur son lit et des larmes roulèrent entre ses longs cils sombres. La domestique considéra un instant les épaules tremblantes de la jeune femme et son cœur se serra un peu plus devant sa détresse évidente.

«  Allons Mademoiselle, calmez-vous, » souffla-t-elle.

Elizabeth ne parut pas l’entendre et un long gémissement de douleur franchit ses lèvres. Inquiète, Estrella se pencha sur elle.

«  Mademoiselle ? Voulez-vous que j’envoie chercher un médecin ? »

A ces mots, Elizabeth frémit et tourna un visage barbouillé de larmes vers sa servante.

« Non !!! Pas de médecin, je t’en prie, » balbutia t’elle, les promesses de Beckett encore à l’esprit.

Estrella la considéra avec impuissance et Elizabeth inspira profondément.

«  Laisse-moi tu veux… »

La voix de la domestique n’était qu’un filet lorsqu’elle répondit.

«  Je ne peux pas Mademoiselle… »

 

Elizabeth lui renvoya un regard blessé tandis qu’Estrella baissait la tête et rougissait de honte.

« Lord Beckett a ordonné que vous ne restiez pas seule… Il a dit que, que nous serions tous renvoyés sans le moindre gage ni recommandation si nous n’obéissions pas à cet ordre. »

Les lèvres d’Elizabeth s’incurvèrent en une moue de mépris haineux.

« Lord Beckett… »

Estrella la considéra avec pitié.

«  Mademoiselle, je suis désolée mais…

- Laisse Estrella, » soupira Elizabeth brusquement très lasse.

Sans attendre de réponse, la jeune fille se recroquevilla dans un coin de son lit et ferma les yeux tandis qu’Estrella prenait place dans un fauteuil à ses côtés.

«  Mademoiselle est ce que, est ce que quelque chose vous ferait plaisir ? Demanda la bonne avec hésitation.

- Non, il n’y a plus rien, plus rien. » Souffla Elizabeth avant de fermer les yeux.

 

()()

 

Le lendemain, les yeux cernés et le poignet douloureux, Elizabeth sursauta alors que la porte de sa chambre était violemment ouverte et les rideaux tirés.

« Monsieur ! S’insurgea Estrella à l’adresse de Mercer.

- Je vois que vous avez suivi mes ordres, pavoisa Beckett qui entra dans la pièce à la suite de son sous fifre.

«  Que signifie cette intrusion !! » Ragea Elizabeth qui, les larmes passées, se découvrait l’envie d’en découdre.

 

Lord Beckett lui adressa un sourire désagréable.

« C’est justement l’objet de ma visite. Je viens vérifier que nulle intrusion n’a été commise. »

Elizabeth blêmit.

« Vous ne pouvez pas, vous n’avez pas le droit.

-C’est bien ce qui vous trompe ma chère, j’en ai non seulement le droit mais également le devoir. Mercer faites sortir cette domestique qui reste là à regarder !! »

Estrella lança un regard rempli d’inquiétude à sa jeune maîtresse mais Mercer la saisit sans douceur par le bras.

«  Vous avez entendu Lord Beckett ? Sortez. »

La mort dans l’âme, Estrella n’eut pas d’autres choix que d’obéir tandis que Beckett faisait signe au médecin falot qui l’accompagnait.

«  Docteur Sillers, allez y je vous prie. Quand à vous Mademoiselle Swann, je vous conseille de vous montrer conciliante ou vous pourriez le regretter. »

Révoltée, Elizabeth se tourna vers le médecin qui la toisa d’un air froid.

«  Allongez-vous.

- Non !!!

- Alors vous avouez ? » Se moqua Beckett.

Elizabeth lui lança un regard haineux mais le lord balaya sa fureur à peine contenue d’un geste négligent de la main.

«  Allons, cela suffi. Allongez-vous et laissez le Docteur Sillers faire la preuve de votre indignité, des malades l’attendent. »

 

Le docteur se tourna vers elle son visage froid.

«  Allongez-vous et relevez votre chemise. »

Elizabeth tourna un visage paniqué vers Beckett.

«  Vous n’allez tout de même pas rester !!! »

Le lord ricana.

« Allons bon, voilà à présent que vous vous targuez d’une fausse pudeur. Vous en sembliez pourtant dépourvue il y a peu de cela. »

Elizabeth rougit de honte au souvenir de la scène qu’il avait interrompu la veille et un nouveau rire échappa au lord.

«  Soit, venez Mercer. Laissons Mademoiselle Swann savourer son dernier moment de pseudo innocence. »

Elizabeth laissa échapper un soupir de soulagement mais le lord reprit.

«  Tâchez d’être docile Mademoiselle Swann, sans quoi Monsieur Mercer s’assurera de votre obéissance. »

 

Elizabeth frémit tandis que les deux hommes sortaient.

 

Une fois seule avec le médecin, Elizabeth jeta un regard éperdu à ce dernier.

«  Je vous en prie, souffla-t-elle d’une voix mourante.

- Dépêchez-vous Mademoiselle, » répondit simplement l’homme.

La mort dans l’âme, Elizabeth obéit et releva sa chemise d’une main tremblante. Le regard froid du médecin se posa sur ses cuisses tandis qu’il sortait ses instruments. Elizabeth frémit à la vue d’un écarteur de métal et d’une loupe.

«  Ecartez les jambes. »

Tremblante, Elizabeth obéit et des larmes de honte montèrent à ses cils tandis que les mains du médecin écartaient son endroit le plus intime. Un morceau de métal froid la frôla et elle poussa un gémissement étranglé.

« Ne bougez pas. » Ordonna le médecin.

Les mains crispées sur le drap, Elizabeth le vit prendre sa loupe. De longues minutes qui lui semblèrent durer des heures s’écoulèrent puis la torture du métal cessa tandis que le Docteur Sillers s’écartait.

«  Rhabillez-vous, » ordonna t’il.

Tremblante, Elizabeth rabattit sa chemise sur ses cuisses et se recroquevilla sur elle-même.

 

()()

 

Beckett fixa le docteur.

«  Alors qu’avez-vous observé ?

- Elle est intacte Lord Beckett. »

Le visage de ce dernier accusa un bref instant une surprise matinée de contrariété puis il se reprit.

«  Soit, Mercer, assurez-vous que le Docteur Sillers soit raccompagné et payé. »

 

Le lord n’attendit pas de voir si ses ordres étaient suivis et se précipita dans la chambre de la jeune femme.

 

Là il laissa son regard errer complaisamment sur les courbes de la jeune femme puis parla.

« Ainsi vous disiez la vérité… »

Un regard rageur lui répondit et Beckett sourit.

«  Allons ma chère, avouez qu’il y avait de quoi douter… Voilà qui est plaisant et qui vous ouvre de nouvelles perspectives. Une fois en Angleterre, je m’assurerais de vous présenter à quelques amis.

- Quoi ??? » Bredouilla Elizabeth.

Beckett sourit méchamment.

«  Enfin ma chère, le Commodore Norrington était un bon parti pour une femme déshonorée mais puisque ce n’est pas le cas, je veillerais à vous arranger une union disons plus avantageuse. »

Elizabeth blêmit.

«  De quel droit osez-vous !! Vous aviez dit que…

- Allons ce ne serait pas la première fois que vous reprendriez votre parole Mademoiselle Swann, et du reste vous ne sembliez pas si empressée hier soir…

- Pourquoi faites-vous ça ? Gémit Elizabeth.

- Je vous l’ai dit ma chère, j’agis au mieux pour vos intérêts ainsi qu’il est de mon devoir en ma qualité de tuteur. »

 

Elizabeth lui renvoya un regard brûlant de haine mais Beckett l’ignora.

«  Je reviendrais vous informer des détails de notre voyage dans la journée Mademoiselle Swann. En attendant je ne saurais que trop vous conseiller de faire preuve de discrétion et de retenue. Il est hors de question que des scènes fâcheuses comme celles d’hier se reproduisent sous ma garde. »

Elizabeth serra les poings alors qu’il sortait et songea avec rage qu’il était hors de question qu’elle laisse Beckett la vendre au plus offrant comme une vulgaire marchandise…


Chapitre 3                                                                                                         Chapitre 5


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Commentaires: 9
  • #1

    Ladypirate (mercredi, 27 juin 2012 16:17)

    Pauvre Lizzie, quelle humiliation :(
    Je comprends les doutes de James, on ne peut pas dire qu'Elizabeth ait été toujours honnête avec lui, mais j'espère que cette fois-ci, ils finiront ensemble !!!!
    Quant à Will, on ne peut pas dire qu'il est "intact" lui ^^ mais pour une fois, je le plains sincèrement :(
    L'histoire est toujours aussi passionnante, bravo :)

  • #2

    JessSwann (mercredi, 27 juin 2012 17:14)

    J'avoue que là on y va fort effectivement, Lizzie ne passe pas de bon temps ahem.
    Ahhh une Norribeth en puissance ?
    Euh si tu plains Will maintenant.....
    Merciiiii

  • #3

    Ladypirate (vendredi, 29 juin 2012 00:03)

    Je suis plutôt une Sparrabeth d'habitude, mais il est vrai que peu de Fictions Longues s'attardent sur Norrington alors ici je suis plutôt Norribeth c'est vrai ^^
    Bah Will je ne l'aime pas beucoup mais j'ai parfois de la peine pour son personnage (surtout qu'ici, il ressemble davantage à une jeune femme en détresse lol)

  • #4

    JessSwann (vendredi, 29 juin 2012 08:48)

    Lol j'aime bien aussi le Norribeth, c'est pas mon favori mais de temps en temps c'est sympa
    Marquise par contre c'est un de ses pairings favoris
    Lol Will s'en prend toujours plein la tête, mdrrr là il faut que Jack sauve sa donzelle ( donc Will) mdrrr

  • #5

    Ladypirate (samedi, 30 juin 2012 15:02)

    C'est vrai que Will a bien besoin d'être secouru sur ce coup lol
    Jack devrait plutôt aller voir Lizzie (quoique je pense qu'elle est plus apte à s'en sortir seule que Will mdr)

  • #6

    JessSwann (samedi, 30 juin 2012 15:06)

    Lol Liz a aussi James mwahahahaha ....

  • #7

    Ladypirate (samedi, 30 juin 2012 21:07)

    Quelle chanceuse !!
    A moins que ce ne soit justement le fait de les avoir qui causera sa perte : Jack est la seule personne susceptible de tenter Lizzie au point de ne pas attendre James ^^ (bon y a aussi Will mais il ne représente pas un vrai danger lol)

  • #8

    JessSwann (samedi, 30 juin 2012 21:20)

    Ahhh oui Liz a de la chance, d'une certaine manière....

  • #9

    Marquise des Ombres (lundi, 16 juillet 2012 15:00)

    Merci pour ton commentaire Lady Pirate. Ce pauvre Will traverse une mauvaise période, effectivement. Il est vrai que j'affectionne le norrybeth, c'est un pairing qui possède du potentiel ! La suite arrive très prochainement ^^