Elizabeth Turner s'avança lentement sur la colline verdoyante et goûta la douceur du soir qui tombait sur la petite île où elle s'était installée quelques huit ans plus tôt avec son fils qui n'était encore qu'un bébé. La jeune femme sourit avec attendrissement à la pensée de ce dernier, qui, à quelques mètres devant elle, avançait gaiement et chantait la chanson de pirate qu'elle lui avait apprise alors qu'il n'était encore qu'un tout petit garçon. Elle avait appelé son fils William. William troisième du nom, cela allait sans dire attendu qu'il portait le prénom de son père et du père de son père. Elle aurait pu en choisir un autre, celui de son père à elle par exemple, mais Weatherby n'était pas le prénom d'un petit garçon, c'était celui d'un père et Elizabeth ne souhaitait pas que son petit William grandisse trop vite. Parce que depuis un peu plus de neuf ans elle n'avait que lui pour combler le vide de sa vie. Bien entendu, elle ne pouvait en vouloir à Will, son époux, de l'avoir laissée seule durant autant d'années. Parce qu'il n'avait pas eu le choix. Il était devenu capitaine du Hollandais Volant le jour même de leurs noces pour échapper à une mort certaine. Mais pour toutes les choses que l'on désire il y a un prix à payer et Will avait donc été obligé de passer loin d'elle les dix années suivantes et de convoyer les âmes des défunts dans un monde où elle ne pouvait pas le rejoindre.
Après son départ, les premiers temps avaient été difficiles, l'absence de Will l’avait rendue presque folle de douleur après l'unique journée qu'ils avaient pu passer ensembles sur l'île de Molokai. Là où ils avaient conçu William.
Le souvenir de cette journée, du soleil brûlant sa peau, des mots d'amour murmurés par Will avait illuminé ses dix dernières années…Chaque fois qu'Elizabeth posait les yeux sur son fils, il lui semblait revivre ce jour inoubliable où, au terme de tant d'épreuves et de doutes, elle était enfin devenue Madame Elizabeth Turner. Dans tous les sens du terme. Lorsque Will était parti, elle avait senti quelque chose se briser en elle, cassant tous les rêves et les illusions qu'elle avait nourris jusqu'alors. Elle avait perdu l'espoir et s’était résignée à attendre la mort jusqu'à ce qu'elle découvre que l'enfant de Will grandissait en elle. Alors Elizabeth Turner avait repris espoir. Et elle avait attendu comme la cruelle Calypso lui avait suggéré de le faire.
Dix ans. Dix années d'attente. Dix années retirée du monde avec son fils, dans l’espoir de gagner la liberté de Will par le sacrifice de sa vie de femme. Elle avait renoncé à la mer, à la piraterie, à l'amour charnel, à tout ce dont elle avait rêvé enfant dans l'attente de ce jour où son époux lui reviendrait enfin. Libre d'une malédiction cruelle, libre de l'aimer et de partager enfin son existence et celle de son enfant.
Attendrie, Elizabeth posa son regard sombre sur son fils et sourit de le voir aussi impatient qu'elle de voir ce père qu'il n'avait jamais connu. Lentement, Elizabeth attira William à elle et sourit avec émerveillement en voyant le fameux éclair vert luire à l'horizon. Le signe qu'une âme revenait de l'au-delà. Le signe que son amour avait été plus fort que la malédiction.
William leva un regard de pure adoration vers sa mère, le sourire hésitant et Elizabeth lui rendit son sourire, avant de désigner avec une impatience mal maîtrisée le frêle esquif qui se rapprochait d'eux et sur lequel ne naviguait qu'un seul passager. Son mari. William Turner.
Perdant enfin son détachement, Elizabeth prit la main de William et l'entraîna à sa suite. Ils dévalèrent le vallon qu'ils connaissaient dans ses moindres aspérités sans la moindre prudence, courant tout deux vers celui qu'ils attendaient depuis dix ans.
Will, le bandana soigneusement vissé sur le crâne, regarda avec un plaisir mêlé de culpabilité la silhouette d'Elizabeth courir vers lui et ouvrit les bras par réflexe pour recueillir son étreinte.
« Will. Tu m'as tellement manqué. Dit-elle avec des sanglots de soulagement dans la voix.
- Toi aussi. » Murmura Will avant de l'embrasser avec avidité, goûtant ses lèvres fraîches
Elizabeth rit doucement, un rire jeune et heureux, semblable à celui qui était le sien lorsqu'ils n'étaient encore que des enfants grandissant sous le soleil clément de Port Royal et se tourna vers le petit garçon qui l'accompagnait.
« William voici ton papa. Will. C'est ton fils. » Déclara-t-elle avec une fierté vibrante dans la voix.
Will regarda avec étonnement le petit garçon aux yeux sombres qui le fixait avec hésitation.
« Mon, notre… Commença-t-il.
- Oui. Will. Notre fils. Déclara Elizabeth en le couvant d'un regard tendre. William Turner troisième du nom.
- Oh Elizabeth. Souffla Will avec émotion avant de l'attirer à lui.
- Embrasse ton fils plutôt. Suggéra Elizabeth. Il a attendu toute sa vie pour ça. »
Will se pencha maladroitement vers William, un peu mal à l'aise à l'idée du lendemain, et le serra contre lui.
« Bonjour papa. Dit le petit garçon. Je suis content que tu sois là.
- Moi aussi. » Murmura Will en le serrant contre lui.
Elizabeth écrasa une larme sur sa joue avant de se tourner vers Will, la gorge serrée par l'émotion.
« Rentrons, un bon dîner nous attend… Nos premiers tous ensembles. »
Comme dans un rêve, Will se laissa entraîner et serra sans y penser la petite main de son fils dans la sienne tandis que son autre bras était passé autour de la taille d'Elizabeth.
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Le dîner fut semblable à ce dont Elizabeth avait rêvé durant les dernières années et elle goûta pleinement le bonheur de retrouver enfin son mari et de pouvoir montrer à son fils qu'il avait réellement un papa, comme elle le lui avait toujours assuré. Bien entendu les échanges entre Will et son fils étaient encore hésitants et empreints de maladresse mais Elizabeth ne se faisait pas soucis. A présent, ils avaient tout le temps d'apprendre à se connaître. Elle avait été fidèle à son amour, elle l'avait attendu. Et elle l'avait libéré.
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Revenant au présent, elle sourit à Will tandis que de l'autre côté de la table, William dodelinait de la tête et s'efforçait de résister au sommeil.
« Je crois qu'il est l'heure William… Dit-elle gentiment à son fils.
- Mais je veux voir papa… Protesta faiblement le petit garçon.
- Tu verras papa demain et les jours d’après. Lui répondit Elizabeth d'un ton joyeux. Pour l'instant tu dois dormir. Conclut-elle en se levant dans l'intention de mettre William au lit
- Laisse je vais le faire. Intervint Will en se levant, l'air embêté. Et après nous parlerons.
- Si tu veux … » Accepta Elizabeth qui ne pouvait quitter son mari du regard.
Will s'approcha de William et le souleva dans ses bras, il grimaça en le découvrant plus lourd qu'il ne l'avait imaginé.
« Où est sa chambre ? Demanda-t-il, perdu dans cette maison inconnue.
- Par là. » Sourit Elizabeth en débarrassant la table.
Will hocha la tête, il se dirigea vers la chambre et se retourna brièvement vers Elizabeth qui ramassait les assiettes. Un instant le remords le submergea alors qu'il songeait à tous les sacrifices qu'elle avait faits pour lui avant de reporter son attention sur son fils qui le regardait d'un air craintif.
Will le déposa doucement dans son lit, il prit garde à rabattre la couverture sur lui et lui caressa les cheveux.
« William… Ce que je vais te dire est très important d'accord ?
- Oui papa. Répondit William qui luttait visiblement pour garder les yeux ouverts.
- D'abord je veux que tu saches que je t’aime. Et que j'aime ta maman. Mais il y a des choses qu'un homme doit faire quoiqu'il lui en coûte. Déclara gravement Will.
- Je ne comprends pas. » Répondit William en étouffant un bâillement.
Will sourit tristement et lui ébouriffa les cheveux avant de se lever et de souffler la bougie.
« Un jour tu comprendras. En attendant, veille bien sur ta maman d'accord ? »
Will soupira tristement tandis que la respiration régulière de son fils lui répondait. William s'était endormi. Prenant garde à ne pas le réveiller, Will sortit de la pièce et retourna dans la salle à manger qu'il découvrit vide.
« Elizabeth ? Demanda-t-il en prenant garde de ne pas parler trop fort.
- Dans la chambre. Répondit-elle. Dans notre chambre. »
Se sentant encore plus coupable, Will pénétra dans la pièce et grimaça légèrement en découvrant Elizabeth, vêtue d'une longue robe blanche et les cheveux dénoués qui l'attendait patiemment.
« Elizabeth il faut que nous parlions. Se força-t-il à dire en suivant malgré lui des yeux les courbes du corps de sa femme que la chemise laissait largement deviner.
- Plus tard. Répondit Elizabeth qui arborait un sourire mutin. Pour l'instant, ce n'est que toi et moi. » Dit-elle en nouant ses bras autour de son cou.
Will ferma brièvement les yeux, ses mains glissèrent malgré lui sur le corps chaud et vibrant de sa femme, avant de se pencher vers ses lèvres avec un gémissement étranglé. Dix ans songea-t-il en l'allongeant sur le lit, dix années de chasteté, dix années dans le vide de son âme et la froideur de son lit. Dix ans sans pouvoir la serrer contre lui ou l'embrasser. Dix ans c'était cher payé mais cela en valait la peine. Elle en valait la peine et elle, plus que toute autre, méritait ces retrouvailles. Il lui parlerait plus tard, lorsqu'il en aurait le courage se promit il en se traitant mentalement de lâche.
Elizabeth poussa un gémissement étranglé tandis que la main rêche de Will retroussait sa fine robe de nuit de lin blanc. Sa main à la peau brunie par les années caressa les cuisses à la peau pâle d’Elizabeth avant qu'il prenne ses lèvres avec avidité.
« Elizabeth on doit vraiment parler… Souffla Will avant de s'écarter d'elle avec réticence.
- Je veux être ta femme. Maintenant Will. » Gémit Elizabeth en se débarrassant rapidement de sa chemise.
Le souffle de Will se bloqua dans sa poitrine en découvrant son corps nu seulement éclairé par la lumière tremblante des bougies. Avec hâte, les mains mal assurées il effleura sa poitrine offerte tandis qu'Elizabeth inclinait la tête en arrière, un sourire heureux illuminant son visage.
« Tu es belle. Murmura Will. Mon Elizabeth… »
Un sourire languide aux lèvres, Elizabeth se pencha vers Will, sa main glissa sur son torse et défit un par un les boutons qui retenaient la chemise du jeune homme, elle caressa presque sans y penser la longue cicatrice que Bill Turner avait fait à son fils en lui arrachant son cœur.
« Tu m'as tellement manqué… Murmura Elizabeth en l'embrassant. J'ai tant attendu ce moment. »
Will referma ses bras autour d'elle, conscient qu'il agissait mal mais n'ayant ni le courage ni l'envie de la décevoir. Pas maintenant… Ses mains glissèrent sur la peau douce d'Elizabeth tandis que les doigts malhabiles de sa femme défaisaient sa ceinture et le débarrassaient à son tour de ses vêtements. Elizabeth sourit à nouveau et se laissa retomber dans les oreillers avec un soupir.
« Maintenant Will. » Murmura-t-elle comme elle l'avait fait dix ans plus tôt lorsqu'ils avaient fait l'amour pour la première fois.
Avec un gémissement désespéré, Will s'enfonça en elle et la prit profondément tandis que le corps d'Elizabeth se soulevait brutalement, ses doigts agrippant fermement les épaules de Will.
« Will. » Gémit Elizabeth.
Son corps se tendit désespérément vers lui tandis qu'il se forçait au calme et allait et venait précautionneusement en elle. Au bout de quelques minutes, Will se lâcha en elle avec un cri rauque s'apercevant à peine du gémissement frustré de sa femme.
En nage, mais le corps la brûlant encore, Elizabeth se retourna vers Will et posa une main tremblante sur son torse.
« Je suis si heureuse que tu sois là. Finalement nous avons réussi. Nous avons déjoué le destin. Maintenant nous pouvons être tous les trois. »
Will fixa le plafond avant de fermer brièvement les yeux et prit la parole s'en voulant par avance du mal qu'il allait lui faire.
« Je ne vais pas rester Elizabeth… »
Elizabeth se redressa brusquement et le regarda sans comprendre.
« Quoi ? Mais, mais tu es libre Will. Tu, tu n'es plus lié à ce navire, je, j'ai attendu, je t'ai libéré… » Gémit Elizabeth
Will poussa un soupir rempli de regret en lisant sa détresse dans son regard et caressa doucement son visage avant de l'attirer à lui.
« Je sais ça. Ma douce, ma belle, ma courageuse Elizabeth. Mais, je ne peux pas rester … »
Elizabeth, une moue écœurée sur le visage, s'écarta de lui et le regarda avec incompréhension.
« Quoi ? Mais je ne comprends pas Will ! S'écria-t-elle sa voix partant dans les aigus sous l'effet de la détresse qu'elle ressentait.
- Je ne peux pas les abandonner. Expliqua Will d'un ton désespéré.
- Mais de qui parles-tu ? Alors que ton fils et moi nous t'attendons depuis si longtemps !
- Des âmes. Soupira Will. Ils ont besoin d'un guide, ils ont besoin de moi. C'est, c'est mon devoir Elizabeth… Essaie de comprendre. »
Elizabeth le fixa, interdite, des larmes se formèrent dans ses yeux sombres en lisant sa détermination dans le regard de Will.
« J'ai besoin de toi moi aussi. William a besoin de toi… »
Will détourna le regard, les yeux humides avant de la regarder de nouveau.
« Non. Tu es forte Elizabeth. C'est pour ça que je t'aime pce que quoi qu'il arrive tu restes droite, fière. Tu es la reine des pirates. La femme qui n'a pas hésité à se mettre elle-même en danger pour défendre ce à quoi elle croyait. »
Elizabeth détourna le regard, les larmes lui brûlant les yeux.
« Je ne veux pas te perdre…
- Je ne peux pas rester Elizabeth… Murmura Will comme à regret. Je ne peux pas les laisser. S'il te plait essaie de comprendre et me pardonner. Elizabeth s'il y avait un autre moyen…
- Bien sûr qu'il y en a un autre ! S'exclama Elizabeth. Reste auprès de ton fils et de moi et laisse en un autre guider les âmes !
- Non Elizabeth. C'est mon devoir de le faire.
- Dix ans ! DIX ANS ! Hurla brutalement Elizabeth en larmes. Je t'ai attendu dix années ! Est-ce que tu sais le nombre de nuits que j'ai passées à pleurer en attendant ton retour ? Le nombre de fois où ton fils m'a demandé où était son père ?
- Je sais. Moi aussi j'ai pensé à toi… Mon Elizabeth… Et si, si lorsque je reviendrais la prochaine fois tu n'es plus là pour m'attendre, je comprendrais. Je n'ai pas à t'imposer mon choix.
- Je croyais que j'étais ton choix. » Rétorqua Elizabeth avec amertume.
Will se mordit les lèvres et prit son visage entre ses mains la forçant à le regarder.
« Tu l'es toujours mon Elizabeth. Depuis le premier jour, jusqu'au dernier je t'aimerai. Et lorsque, lorsque ton temps sera venu… Je t'attendrais en mer, nous serons ensemble pour toujours …
- Et combien d'années me faudra-t-il endurer la solitude avant ça ? Demanda avec rancœur Elizabeth. Et ton fils que lui dirais-je lorsqu'il me demandera pourquoi son père est parti ?
- Que je l'aime mais que trop de personnes comptent sur moi. Je n'ai pas le droit de les laisser. Elizabeth, je t'en prie… »
Elizabeth renifla, le visage brouillé par les larmes, elle songea à l'inutilité de son sacrifice avant de hocher la tête.
« Fait, fait ce que tu estimes être ton devoir Will. » Répondit elle finalement d'un ton résigné.
Une vague d'amour submergea Will et il la serra dans ses bras.
« Merci. Merci de si bien me comprendre. Sache que tous les dix ans, je serais là, je t'attendrai Elizabeth. »
Elizabeth le regarda, l'air blessé.
« Tais-toi s'il te plait. »
Will soupira lourdement et l'embrassa avec force avant de la serrer contre lui.
« Le soleil va bientôt se lever …
- Bien sur tu dois partir… » Déclara Elizabeth d'un ton vide d'émotions en se levant pour s'habiller.
Will la suivit, il remit en silence son costume de guide des âmes, se sentant à la fois coupable et en paix. Il avait pris la bonne décision, celle que lui dictait son devoir.
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Une fois dehors, Will prit la main d'Elizabeth dans la sienne et sa femme ne réagit pas à son contact. Lentement il l'emmena jusqu'à la plage où, au loin, apparaissait la silhouette du Hollandais Volant qui attendait son capitaine. Avec un soupir, Will attira Elizabeth à lui.
« Je t'aime… Mon cœur t'appartiendra toujours. »
Elizabeth ne répondit pas et songea avec amertume que posséder son cœur ne représentait plus rien à présent qu'il lui préférait son devoir.
Comme dans un rêve, elle se força à lui sourire, ses lèvres rejoignirent les siennes dans un ultime baiser d'adieu avant que Will ne s'installe dans la chaloupe qui l'attendait pour l'emmener vers le navire qu'il n'avait pu quitter que pour une journée.
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Longtemps après le départ de Will, Elizabeth resta sur la plage, sa chemise de nuit blanche flottait comme un étendard brillant au milieu de l'aube à peine naissante. Finalement, elle se laissa tomber sur le sable et des larmes amères roulèrent sur ses joues. Elle avait perdu, elle avait vaincu la malédiction mais c'était finalement le sens du devoir de Will qui avait eu raison d'elle et de leur amour.
Les épaules secouées par les sanglots, elle ne s'aperçut pas que, derrière elle, se tenait le jeune William serrant ses poings d'enfant. Le petit garçon s'était réveillé au hurlement de sa mère et, sans se faire voir, il avait suivi Will et Elizabeth lorsqu'ils étaient sortis de la maison. Il avait vu son père partir. Il avait vu sa mère pleurer. Et dans son cœur, s'était installée une haine aussi brûlante que destructrice pour Will.
Se mordant les lèvres, William se précipita vers la maison. Il fit cogner contre le mur le battant de la porte de la chambre de sa mère avant de se précipiter vers le lit de cette dernière. Sans faire attention aux draps froissés qui avaient été le témoin quelques heures plus tôt des tendres retrouvailles de ses parents, William exhuma le coffre que sa mère cachait soigneusement avant de se lever pour saisir la clef qui reposait comme toujours sur le chevet de sa mère. Avec lenteur, tâtonnant un peu, le petit garçon ouvrit le coffre et retint un haut de cœur en y découvrant le cœur battant de son père.
D'une main hésitante il s'empara du stylet que sa mère conservait toujours à portée de main et il le leva vers le cœur de son père. Les larmes aux yeux, William songea à ce père qui avait été gentil mais distant avec lui, au sourire de sa mère la veille au dîner puis aux larmes qu'il l'avait vu verser quelques minutes plus tôt sur la plage. Alors William troisième du nom, abattit le stylet droit dans le cœur de son père pour lui briser le cœur comme il avait brisé celui de sa mère.
Elizabeth, secouée par les sanglots, vit avec surprise le Hollandais Volant s'approcher et déverser sur la plage les quelques hommes qui avaient choisis de rester à bord lorsque Will avait pris le commandement du navire. Un sourire hésitant se forma sur ses lèvres en reconnaissant Bill Turner et elle se précipita vers lui. Elle referma ses bras autour de lui.
« Il … il est revenu ! Will a changé d'avis c'est ça ? »
Bill la toisa avec froideur et la repoussa comme si elle n'avait été qu'une mouche sur son passage.
« Le Hollandais Volant a besoin d'un Capitaine. » Scanda-t-il, repris par les hommes qui l'accompagnaient.
Perdue et un peu décontenancée, Elizabeth le vit prendre le chemin de sa demeure et son sang se glaça brusquement dans ses veines.
« Will, où est Will ! Hurla-t-elle, courant après les hommes.
- Le Hollandais Volant a besoin d'un Capitaine. Scandèrent les hommes en enfonçant la porte de sa maison.
- Non ! » Gémit Elizabeth.
Elle les devança et courut vers sa chambre.
Là, elle s'immobilisa sur le seuil et poussa un cri d'horreur en découvrant William prostré à quelques mètres du coffre, la main ensanglantée.
« Maman… Bredouilla le petit garçon. Maman pardon je voulais pas. Il, il t'a fait pleurer alors j'ai voulu lui faire mal aussi. »
Bill la poussa, un couteau à demi rongé par le sel marin dans sa main.
« Le Hollandais Volant a besoin d'un capitaine … »
Folle de terreur, Elizabeth se précipita vers William. Elle mit ses bras en croix devant lui pour le protéger et chercha du regard une épée pour les défendre tous les deux.
« Non ! Ce n'est qu'un enfant ! Non vous n'avez pas le droit !
- Maman. Y se passe quoi ? Demanda William d'une voix au bord des larmes.
- William, cours ! La porte de derrière dépêche toi ! Hurla Elizabeth, paniquée.
- Le capitaine. Siffla Bill qui tendit la main vers le petit garçon pour le saisir, déclenchant un hurlement de terreur chez ce dernier.
- William ! » Cria Elizabeth en se précipitant vers Bill, qui déjà, forçait le petit garçon à s'allonger sur le sol.
Elle amorça un mouvement vers eux tandis que William hurlait avant de sentir un coup violent derrière sa tête qui la fit sombrer dans le noir le plus total.
Lorsqu'elle reprit conscience, de longues minutes après, Elizabeth poussa un hurlement en découvrant la pièce vide. Une flaque de sang frais mouillait le sol à quelques mètres d'elle. Les hommes du Hollandais Volant avaient disparus, emportant avec eux le coffre et son fils …
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