Jack ne savait pas ce qui l’avait poussé à s’embarrasser de la compagnie de la fille qui marchait à ses côtés, mais à l’instant où il l’avait vue, agenouillée dans cette église, si jeune, si seule, il avait eu envie de la connaitre.
Déployant tout le charme et la galanterie dont il était capable, il l’avait conviée à une promenade, s’attendant à ce qu’elle décline, mais, à sa grande surprise, ce ne fut pas le cas. Voilà comment il se retrouvait à présent sur le port, flanqué d’une religieuse.
Angelica, sa robe blanche de novice flottant autour d’elle telle une corolle, se retourna vers Jack, un sourire radieux aux lèvres.
« Je n’avais jamais vu l’océan, c’est tellement… beau », lâcha-t-elle, à court de mots.
Emu à son corps défendant, le pirate l’embrassa sous le coup d’une irrésistible impulsion. La future nonne était si jolie qu’il n’avait pas pu résister. Au lieu du recul effarouché devant son audace auquel il s’attendait à demi, Angelica éclata d’un rire cristallin avant de plaquer ses mains devant sa bouche.
C’était sans doute la première fois qu’elle riait ainsi depuis son arrivée à Séville, trois ans plus tôt. Les religieuses goûtaient peu l’amusement.
Lorsqu’il l’entendit exprimer si simplement sa joie, Jack comprit que cette espagnole aussi belle que plantureuse compterait dans sa vie.
Angelica regarda avec adoration le Grand Prophète Jack. Cela faisait des mois qu’elle cherchait à attirer son attention.
Devenir l’Elue, la concubine attitrée de leur guide spirituel, elle en rêvait. Pourtant, en dépit des trésors de séduction qu’elle déployait, il ne la regardait pas. Il n’avait d’yeux que pour Elizabeth, la fille du Gouverneur de l’Etat de Caroline.
Angelica la haïssait, cette catin blonde, indigne de recevoir les attentions de leur prophète. A chaque fois qu’elle voyait son minois délicat, elle avait envie de la rosser jusqu’à ce qu’elle en crève.
« Mettez vos masques de cérémonie, ordonna Jack. L’heure de notre communion est proche. »
Angelica serra les dents tandis qu’Elizabeth, vêtue de la robe de cérémonie bordée d’argent qui signalait son statut particulier, passait parmi eux pour leur distribuer le broc de rhum grâce auquel ils atteignaient l’extase suprême, laissant dans son sillage un délicat parfum de menthe et de citron.
Oubliant la gêneuse, Angelica se tortilla lorsque le Grand Prophète s’arrêta devant elle. Vêtu d’une aube somptueuse, Jack fixa intensément la jeune adepte.
« Angie… Te voilà devenue apte à passer au niveau supérieur, » déclara-t-il au grand plaisir de la jeune femme.
Elle leva ses grands yeux sombres sur le visage entouré de dreadlocks de Sparrow, remplie d’espoir. Un sourire doré lui répondit et il lui désigna une longue robe de velours bleu nuit.
« Revêts-la et rejoins ton apparié. William sera ton compagnon dans le culte du Serpent à Plumes. »
Elizabeth la rejoignit pour l’aider à s’habiller et Angelica dut endurer la brulure de ses lèvres fraiches sur son front tandis que le Prophète en faisait de même pour son promis à quelques mètres d’eux.
« Bois cul sec, ça passera mieux, » lui glissa Elizabeth.
Angelica obéit machinalement et vida sa chope.
Elle s’avança ensuite vers William qui semblait aussi perdu qu’elle et ses yeux s’arrondirent de révérence alors que le Serpent à Plumes lui apparaissait dans sa splendeur.
« Je pensais que tu serais contente de me revoir…
— Après avoir disparu brusquement sans la moindre explication ou lettre ? Ça fait des années, Jack… Des années que je t’attends. Pourquoi m’as-tu fait une chose pareille ? Pourquoi m’as-tu abandonnée ?
— Je ne sais pas, ça me paraît pourtant évident, murmura Jack. Tout ça, le mariage, les enfants, ce n’est pas pour moi Angelica. »
La jeune femme, visiblement prête à exploser, le toisa.
« Parce que tu crois que j’ai envie de t’épouser et d’avoir des gamins ?» s’étrangla-t-elle presque de fureur.
Un large sourire s’épanouit sur les lèvres du pirate.
« Nous sommes d’accord ! Je ne t’aime pas, mais j’aime faire l’amour avec toi alors… qu’est-ce qu’on attend pour passer dans ta chambre, trésor ? »
La jeune femme se décomposa.
« Pourquoi être revenu si c’est pour me faire souffrir ? »
Le pirate eut la bonne grâce de sembler contrit avant de renouer avec son insolence coutumière.
« Je passais dans le coin et je me suis demandé ce que tu devenais. Mais je décèle dans ta fureur que ma présence est indésirable… »
Sur ces mots, Jack vissa de nouveau son tricorne sur son crâne et Angelica frémit. Elle allait le perdre. A nouveau. Et cette fois, il ne reviendrait jamais. Faisant fi de son orgueil, elle gémit.
« Je suis désolée, ne pars pas. »
Angelica regarda autour d’elle et exhala un faible soupir de soulagement en ne voyant rien de plus que du sable à perte de vue.
Ainsi, c’était cela, le fameux Purgatoire de Jones. Pour l’instant, cela n’avait rien d’aussi horrible que l’endroit qu’on lui avait dépeint…
« Bugger… Angelica ? »
La jeune femme s’immobilisa net en reconnaissant la voix de l’homme qui l’avait trahie et bafouée des années plus tôt. Alors qu’elle se préparait à prononcer ses vœux, elle avait rencontré Jack Sparrow et n’avait pas tardé à succomber à son charme. Elle était tombée amoureuse et au lieu de garder sa virginité intacte pour Dieu, elle s’était offerte au pirate le temps d’une nuit.
Elle pensait que leur couple durerait éternellement et qu’il l’épouserait…
Mais, lorsque le lendemain de leur étreinte, elle avait gravi les escaliers menant à la petite chambre dans laquelle il s’était installé, elle l’avait trouvé assis sur le lit, la tête rousse d’une catin s’activant entre ses jambes.
Jamais elle n’avait pu oublier les râles immondes qu’il poussait alors que la fille lui dispensait du plaisir.
« Oui, trésor, c’est bon… Je ne peux pas me passer de toi… »
Les mêmes mots que ceux qu’il lui avait adressé la veille…
Désemparée, Angelica avait fui et était retournée au seul endroit qu’elle connaissait : le couvent.
Hélas, sa souillure avait été rapidement découverte et les sœurs l’avaient chassée ne lui laissant pas d’autres perspectives que la prostitution ou la piraterie. Elle avait choisi la seconde option… Ce qui l’avait amenée ici, droit au Purgatoire.
« Avoue que j’t’ai manqué, » déclara un Jack aviné.
Une éternité aux côtés de l’homme qui lui avait brisé le cœur et qu’elle haïssait autant qu’elle l’aimait. C’était la pire chose au monde.
« Du rhum ? » proposa Jack avec un sourire éclatant.
Oui, décidément, cela risquait d’être long…
C’était la première fois que Jack se retrouvait sur une île et, comble de malchance, il fallait que ce soit avec Angelica… Ils étaient ennemis depuis que Jack avait fait en sorte qu’elle soit renvoyée du couvent dans lequel elle gaspillait sa beauté.
Jurant de se venger, elle l’avait traqué sur les sept mers et, à la faveur d’une étourderie de l’homme de garde, elle était parvenue à s’introduire à bord du Pearl.
A partir de ce moment, des choses étranges s’étaient déroulées : manifestations surnaturelles, disparition de rhum… Cela avait fini par taper sur le moral de l’équipage et ils s’étaient mutinés. En dépit des efforts de Barbossa pour l’aider en exhibant la passagère clandestine, Jack avait été débarqué au large de l’île, Angelica avec lui.
Il se tourna vers la jeune femme avec un vague dégout.
« Satisfaite ? »
Un regard noir lui répondit.
( ) ( )
Trois jours… Cela faisait trois jours qu’ils végétaient sur cette île.
Nerveuse, Angelica ne cessait d’arpenter la plage de long en large et Jack soupira.
« Pourquoi tu as fait ça ? l’interrogea-t-elle tout à trac. Pourquoi tu as ruiné ma vie ?
— Trésor, tu n’étais pas faite pour toutes ces bondieuseries… »
Elle ne répondit pas, consciente qu’il n’avait pas tout à fait tort… A présent qu’elle avait gouté à la vraie vie, elle ne retournerait sous aucun prétexte au cloitre.
« Et puis, poursuivit Jack. J’avais aussi terriblement envie de passer du temps avec toi… »
Elle le fixa, cherchant à évaluer sa sincérité. Elle croisa le regard caressant du pirate et frissonna.
« Maintenant, je ne sais pas si je veux t’embrasser ou te tuer.
— Puis-je choisir ? » susurra Jack avant de refermer ses bras autour de la jeune femme, unissant leurs lèvres en un baiser.
Angelica plissa les yeux et leva le visage vers le ciel obscurci par un immense nuage noir. Jack roula des yeux effarés autour d’eux.
« Je ne sais pas ce qui arrive mais je propose que nous fassions la seule chose raisonnable : fuir ! »
Agacée par sa couardise, Angelica lui adressa un coup d’œil méprisant.
« Quand je pense que je me suis crue amoureuse de toi… Comment ai-je pu être aussi bête ? Tu n’es rien d’autre qu’un lâche, un pirate de pacotille, un…
— Le plus beau avec les histoires d’amour, c’est le début… ironisa Jack, vaguement vexé. Quant on ne se connait pas encore. Crois-moi, Angie, j’en ai autant à ton service, tu es… »
Le bruit d’un froissement d’ailes les interrompit et ils se retournèrent tous deux, à peine surpris de découvrir un dragon duquel descendit une femme aussi jeune que blonde.
L’inconnue les toisa et un sourire séducteur s’épanouit sur les lèvres de Jack en découvrant sa beauté.
« Qui êtes-vous et que faites-vous ici ? les interrogea Daenerys d’un ton dur. Est-ce Cersei qui vous envoie ? »
Angelica, agacée par l’intérêt que Jack ne cherchait même pas à dissimuler, rétorqua.
« Ça serait plutôt à toi de te présenter, gamine. »
Daenerys plissa les yeux, furieuse.
« Dracarys ! » lâcha-t-elle.
Immédiatement, l’énorme dragon que, toute à sa jalousie, Angelica avait oublié, exhala un panache de flammes sur la pirate, la grillant net.
Un couinement échappa à Jack et il se tourna vers Daenerys.
« J’étais pas avec elle, s’empressa-t-il d’affirmer. Rien à voir, je passais par là… Je vais juste…
— D’où viens-tu ?
— D’un… bateau ? tenta Jack.
— Tu es un Fer-Né ?
— Non, mais je peux l’être si ça vous arrange », affirma Jack.
Daenerys hésita puis un léger sourire naquit sur ses lèvres.
« Tu sembles débrouillard. Je t’enrôle. »
Jack coula un regard inquiet vers le dragon puis s’inclina profondément.
« A votre service, ma Reine. »
Jack recula alors qu’Angelica lui présentait l’homme qui l’accompagnait.
« Bugger… lâcha-t-il.
— Le Père Swift est là pour célébrer notre mariage, se réjouit la belle brune.
— Je ne me rappelle pas que nous ayons parlé de ça, couina Jack. Et, trésor en dépit de notre entente et de… »
Le visage d’Angelica se brouilla et il soupira.
« Je suis désolé, Angie. Je t’aime, mais je ne peux pas rester. Ni t’épouser. »
Cette fois, la fureur envahit les traits de la belle espagnole.
« Jack… Tu as promis et je t’ai laissé m’embrasser. C’est là que je t’ai dit que notre histoire n’irait pas plus loin tant que nous ne serions pas unis sous le regard de Dieu. J’espère que tu ne vas pas oser prétendre que tu ne t’en rappelles pas.
— Le pont des souvenirs est toujours désolant, les soleils d'avenir sont plus ou moins brillants, rétorqua le pirate avec aplomb.
— Quoi ? réagirent au même moment Angelica et le prêtre.
— A quoi bon ressasser le passé quand le futur nous attend. Séparément, ajouta Jack avant de commencer à courir en direction de son navire sous les yeux écœurés de la jeune femme.
— Tu ne t’en sortiras pas comme ça cette fois ! hurla la jeune femme. C’est toi qui as tout fait pour me séduire ! Je n’ai jamais voulu t’aimer !
— Alors, arrête de le faire », lui cria Jack sans ralentir sa course éperdue.
La fille qui réussirait à enchaîner Jack Sparrow avec un simple baiser n’était pas encore née, foi de Capitaine !
Angelica écarquilla les yeux, sa consternation grandissant à mesure qu’elle découvrait les différentes vignettes composant son couple avec Jack.
« Oh mon dieu... Je suis devenue aussi niaise que toutes ces filles dans les romans à l'eau de rose... C'est un cauchemar. »
Elle se tourna vers Jack, curieuse de connaitre son opinion.
« En même temps, trésor, on ne peut pas dire que tu fasses preuve de discernement dans On Stranger Tides… Te sacrifier pour ton prétendu père… »
La jeune femme lui adressa un regard noir.
« Bon, comment on sort d’ici ? »
Au lieu de l’aider à chercher une issue, le pirate s’assit sur le sol et s’empara de la bouteille de rhum qui ne le quittait jamais.
« Connaissant l’auteure, on est là pour un bout de temps… » déclara-t-il en portant le goulot à sa bouche.
Angelica grinça des dents avant de se résigner. S’il fallait supporter cinquante et une vignettes… autant le faire en étant complètement saoule !
Angelica, tremblante dans sa tenue virginale fit face à Jack. Dès l’instant où elle avait accepté de le suivre, désertant ses devoirs religieux, elle avait su que cela allait se terminer ainsi. Le pirate était trop beau, trop attirant pour qu’elle songe à honorer ses vœux de chasteté plus longtemps… Pourtant, maintenant que le moment de renoncer définitivement à son enfance était arrivé, elle ne pouvait s’empêcher d’éprouver de la peur.
Sentant sans doute son angoisse, Jack l’embrassa profondément, avec plus de tendresse qu’il n’en offrait d’ordinaire à ses conquêtes. Tout en jouant avec sa langue, il défit lentement les boutons de l’affreuse robe de novice qu’Angelica portait. Cette dernière ne put retenir un gémissement paniqué en sentant l’air frais caresser sa peau nue et amorça une protestation.
« Chuuuut. Tout va bien se passer, » lui promit le pirate.
Les mains de Jack entreprirent une lente caresse sur le corps de la jeune femme et un long frisson la secoua lorsqu’il remonta jusqu’à sa poitrine offerte, ses doigts titillant ses tétons érigés.
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Le pirate était en elle et, passé les premiers instants douloureux qui avaient fait d’elle une femme, Angelica n’avait plus éprouvé qu’un plaisir délicieux qui montait crescendo en elle. Elle gémit lourdement :
« Oh Seigneur….
— Tu peux m’appeler Jack aussi, » s’amusa le pirate, haletant sous l’effet de sa propre jouissance.
Une fois l’acte dûment consommé, Jack roula sur le côté, un sourire satisfait aux lèvres. Le cœur battant, Angelica se pelotonna contre lui, rassasiée. Une chose était certaine : cette première fois ne serait pas la dernière !
Ils avaient mis du temps à se trouver, mais, contre toute attente après s’être aimés, déchirés, fuis, affrontés, ils avaient dû se rendre à l’évidence : ennemis ou amants, ils ne pouvaient se passer l’un de l’autre.
Les yeux encore bouffis de sommeil, Angelica observa Jack se lever à la dérobée et soupira.
« Je croyais qu’on en avait fini avec tout ça… »
Le pirate s’immobilisa et baissa la tête.
« Ce n’est pas ce que tu penses, je compte revenir. J’ai juste un petit, tout petit détail à régler, une broutille somme toute mais…
— Laisse tomber Jack. A ce stade, je voudrais juste que, pour une fois, tu me dises la vérité.
— Je ne mens pas ! » s’insurgea le pirate.
Il s’approcha d’elle d’une démarche chaloupée.
« Je te jure de revenir, » déclara-t-il brusquement sérieux, avant de l’embrasser.
Le gout du rhum encore sur les lèvres, Angelica soupira.
« Comment pourrais-je encore te croire ? Depuis que je te connais tu n’as fait que me mentir. »
Jack la fixa intensément puis arracha le compas qu’il portait à sa ceinture et le déposa entre les mains de la jeune femme.
« C’est mon bien le plus précieux après le Pearl. Je veux que tu le gardes pour moi en attendant mon retour. »
Stupéfaite, Angelica baissa les yeux sur le boitier sombre qui reposait au creux de sa paume.
« Tu es vraiment sérieux ? Tu es prêt à me donner ton compas ?
— Prêter, pas donner, s’empressa de corriger Jack. Mais… oui. Angie, je ne mens pas. Je reviendrai vers toi parce que… »
Elle posa délicatement ses lèvres sur celles du pirate et lui sourit.
« Moi aussi. »
Liste des défis du Discord de l'Enfer de Dante auxquels cette vignette répond :
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